• Chapitre 17

    Ylios ne comprenait pas trop pourquoi Tremon avait l’air en colère contre Miral. Ils étaient arrivés à l’endroit où ils avaient laissé Seih, mais n’avait rien trouvé. A ce moment-là, Tremon avait fait volte-face pour dévisager Miral d’un air peu engageant. Celui-ci avait tenté de bégayer quelque chose avant d’abandonner et de fixer ses chaussures d’un air penaud.

    -Peut-être qu’elle s’est réveillée et qu’elle est parti avec les deux filles.

    Tremon se tourna vers Gialema pour répliquer sèchement :

    -Oh, crois-moi, je ne pense pas qu’elle ait été en état de marcher.

    Un mouvement dans les buissons attira leur attention et tous se mirent sur leur garde quand un jeune homme apparut. Tout chez lui était vert. Vêtements, cheveux, yeux et peau. Il les dévisagea un instant avant de dire :

    -On a trouvé les filles et votre amie. Elles sont au camp. Suivez-moi.

    Ylios se tourna vers ses amis avec un demi-sourire :

    -Mes parents m’ont toujours dit de ne pas suivre les inconnus.

    Tremon lui lança un regard désespéré avant de suivre leur nouveau guide. Miral lui envoya un coup de coude :

    -Content de voir que tu vas mieux.

    Ylios eut un rire encore timide, mais un rire tout de même. Ils se mirent en route. Le jeune homme les mena en silence jusqu’à ce qui semblait être un lac. Une barque attendait sur la berge boueuse et leur guide les invita à monter. Ils naviguèrent sur une courte distance avant d’apercevoir une île bordait de saules pleureurs immenses. Leurs longs rameaux flottant au gré du courant. L’embarcation passa dessous pour atteindre le rivage. Sur la terre grise de l’île, ils aperçurent des baraques de bois qui formaient un village. Personne n’avait parlé durant le court trajet et sitôt qu’ils posèrent un pied à terre. Un homme plus âgé apparut, entourait de villageois. Tous avaient la peau verte. Ylios reconnut l’odeur des grenouilles. Apparemment, ce village n’était peuplé que de batracien.

    -Vous allez bien ?

    Tremon dévisagea le vieil homme avec méfiance alors que Ylios répondait au nom de tous :

    -Oui, ça va. On nous a dit que notre amie était ici.

    Le vieil homme hocha la tête :

    -Nous la soignons. Je me nomme Rtikitave, chef de ce village.

    Ylios sourit et présenta ses compagnons en les désignant de la main :

    -Ylios, voici Miral, Gialema et Tremon.

    Miral fit un pas en avant :

    -Est-ce qu’on peut voir notre amie ?

    Rtikitave eut une grimace :

    -Désolé, il ne vaut mieux pas pour l’instant. Puis-je savoir ce que vous êtes venu faire dans cette forêt ?

    Ylios ouvrit la bouche pour répondre, mais Tremon le devança :

    -On voulait la contourner, mais nous avons été piégé par des Errants.

    Le vieil homme eut un sourire triste :

    -C’est comme cela que vous les appelez ?

    Tremon haussa les épaules :

    -Chez nous, oui.

    Miral ne put s’empêcher d’ajouter :

    -Vous les appelez comment vous ?

    Rtikitave leva un sourcil :

    -Les tarés.

    Miral ne put s’empêcher de ricaner :

    -Ça se tient.

    Tremon eut un geste exaspéré qui le fit taire :

    -Si vous pouviez nous aider à sortir de la forêt, nous vous en serions reconnaissants.

    Le chef parut d’abord surpris, puis s’assombrit :

    -Vous ne croyez pas que si on pouvait quitter cette forêt, on l’aurait déjà fait ?

    Un ange passa le temps que les quatre amis réalisent ce qu’il entendait par ces paroles. Ce fut Ylios qui réagit le premier :

    -Vous voulez dire qu’on ne peut pas sortir ?

    Rtikitave secoua la tête :

    -Je veux dire qu’ils ne nous laissent pas sortir. Les tarés rôdent dans tous les coins et attrapent ceux qui quittent l’île.

    Miral s’empressa de demander :

    -On a aidé deux petites dans la forêt, elles étaient parties toutes seuls ?

    Le vieil homme secoua de nouveau la tête :

    -Zerda et Pioune étaient avec leur père. Il a essayé de les emmener, de quitter la forêt.

    Ylios n’en croyait pas ses oreilles. Est-ce que tous ces gens avaient toujours vécu dans cette espèce de captivité ? Il allait poser la question quand Tremon le devança à nouveau :

    -Combien de temps pour soigner la fille ?

    Ylios ne put s’empêcher d’être un peu choqué de l’entendre parler de Seih de cette façon. Le chef répondit :

    -Eh bien, des jours probablement.

    Tremon fronça le nez :

    -C’est trop long.

    Il se tourna vers ses trois compagnons :

    -On repart.

    -Quoi ? Non. Ça ne va pas. Hors de question !

    Ils avaient protesté en chœur, même Gialema n’avait pas hésité à ajouter sa voix à celle des deux garçons. Tremon les observa avec sévérité, prêt à répliquer quand Rtikitave intervint :

    -Vous pouvez rester ici sans problème. Les tarés n’ont jamais tenté de s’attaquer à l’île directement. Je ne pense pas qu’ils sachent où nous nous trouvons en vérité.

    Il s’adressa plus particulièrement à Tremon en ajoutant :

    -Je comprends que vous vouliez tenter de partir coûte que coûte, mais toutes vos tentatives seront vouées à l’échec si vous ne prenez pas au moins le temps de vous reposer.

    Ylios s’avança pour attirer Tremon à l’écart :

    -Excusez-nous.

    Matior ajouta comme ils s’éloignaient :

    -Ne vous inquiétez pas. Ils font ça souvent.

    Une fois à l’écart, Ylios dit :

    -C’est une chance, Tremon. On ne sait pas où aller et les gardes à nos trousses. Si même des gens qui habitent cette forêt n’arrivent pas à trouver cet endroit, alors c’est la meilleur planque.

    Tremon le dévisagea avec une telle fureur que Ylios dût baisser les yeux. Pourtant, lorsqu’il parla se fut d’une voix tremblante de frayeur :

    -Il y a quelque chose qui ne va pas avec moi.

    -Ton truc de l’ouïe ?

    -Non, autre chose. Je ne sais pas quoi exactement, mais c’est pas bon. Pas bon du tout.

    Ylios ne sut quoi dire et Tremon finit par se détourner et s’éloigna du groupe à grands pas. Les villageois qui entouraient le chef le regardèrent s’éloigner avec un mélange d’inquiétude et de pitié. Ylios se sentit obligé de dire à Rtikitave :

    -Ne vous inquiétez pas. Il va se calmer. Il ne partira pas tout seul.

    Le vieil homme fit néanmoins un signe à un couple sur sa droite :

    -Suivez-le. Veillez à ce qui ne lui arrive rien.

    L’homme et la femme firent un signe de tête et coururent pour rattraper leur retard sur Tremon. Ils laissèrent néanmoins, une certaine distance entre eux et le garçon. Rtikitave revint au trois autres :

    -On va vous trouver un coin où dormir…

    Une femme intervint :

    -Nous avons notre réserve. On peut mettre des couvertures et des coussins.

    Le chef hocha la tête :

    -Oui, très bien. Suivez Til, elle s’occupera de vous.

    Bien qu’il se sentit à présent en sécurité, Ylios continuait de penser à ce que lui avait dit Tremon. De leur côté, Miral et Gialema étaient aux anges. Ils allaient pouvoir se reposer et manger. Ils salivaient déjà à l’idée d’un vrai repas. Miral rejoignit le chef avant qu’il n'est le temps de s’éloigner alors que les villageois se dispersaient déjà :

    -Excusez-moi.

    Le vieil homme baissa les yeux :

    -Oui ?

    Miral sortit quelque chose de sa poche que Ylios ne put distinguer :

    -Ils lui ont donné ça, à Seih. Apparemment, ça l’aidait à ne plus rien ressentir. Je ne sais pas, ça peut peut-être être utile.

    Rtikitave sourit en tendant la main pour recevoir les fioles :

    -Je te remercie. Je vais la donner à nos guérisseurs. Ils sauront sans doute quoi en faire.

    Le Chef s’éloigna les laissant avec la femme nommait Til.

    -Suivez-moi.

    Ils obéirent docilement et tout en marchant, elle leur demanda :

    -Alors ? Comment c’est en dehors ?

    Ylios observa la femme qui portait les cheveux mi-long. Elle n’était pas aussi âgée qu’il l’avait pensé. En fait elle devait avoir à peine deux ans de plus qu’eux. Mais elle avait les traits tirés, amaigris. C’est sans doute ce que cela fait de vivre cloîtrer sur une île.

    -Ce n’est pas si génial que ça.

    Les deux garçons s’étaient tournés vers Gialema. Elle avait parlé d’une petite voix, presque un murmure, mais Til l’avait entendu :

    -Vraiment ?

    Elle ne semblait pas déçue, ni intéressée. En fait, c’était comme si elle avait juste cherché à briser le silence sans vraiment prêter attention au sujet qu’elle lançait. Ylios voulu continuer la conversation, mais il ne sut quoi dire. Gialema se contenta d’ajouter :

    -Vraiment.

    Et ce fut tout. Til les mena à une des cabanes près de laquelle se tenait un cabanon plus petit.

    -C’est là.

    Elle ouvrit la porte et ils découvrirent un espace rempli d’étagère pleines de pots. Til s’empressa de les rassurer :

    -On va bouger tout ça, vous en faites pas. En décalant tout vers le fond, vous verrez, l’espace n’est pas si petit qu’il en a l’air.

    Ylios hocha la tête en souriant :

    -Pas de problème. On peut le faire.

    Il chercha confirmation auprès de ses amis qui approuvèrent. Gialema s’avança :

    -Ne vous inquiétez pas, on va se débrouiller.

    Til passa de l’un à l’autre avant de sourire :

    -D’accord, je vais chercher des couvertures.

    Elle s’éclipsa sans attendre de réponse. Ylios tapa dans ses mains une fois qu’elle se fut éloigné.

    -Allez, au boulot.

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