• 36 - Xutik : Pas totalement serein lui non plus

    Xutik Razaug

    Rang : Or

    Héritier de la grande famille Razaug

     

    -Elférad ? Hé.

    L'adolescent se secoua en murmurant :

    -Mais c'est pas lui... Ou il a vraiment rien à foutre.

    Xutik lui secoua le bras :

    -Hé, c'est qui qui a des infos ?

    Elférad se tourna vers lui comme s'il le découvrait pour la première fois :

    -Quoi ?

    Xutik pointa de la tête, la porte par laquelle le couple venait de sortir :

    -Les infos ? C'est qui qui les a ?

    -Le deuxième des Cinq. Autant dire que c'est une impasse.

    Il allait sortir, mais Xutik le retint :

    -Tu ne finis pas ton assiette ?

    Elférad revint :

    -Ah, non. J'ai plus faim.

    Xutik nota, alors qu'Elférad vidait son assiette dans la poubelle, que le garçon avait à peine mangé. Pas totalement serein lui non plus. Il se retint de lui demander de rester, car il ne voulait pas manger seul. Quand Elférad quitta la pièce, Xutik retourna à son assiette le cœur lourd.

    Sa théorie des rivaux qui auraient voulu l'éliminer pour avoir le champ libre avec Hiloy avait fini par s'effondrer sous l'insistance de Gec-Nüj. Il avait alors eu une nouvelle idée. Lae Cinquième avait monté le coup pour le sauver et qu'il tombe amoureux d'ellui. L’héritier d’or avait déjà vu ça dans des livres. Mais à nouveau, il avait dû faire avec le scepticisme de son ami. Quelques remarques de sa part avait fini par ranger Xutik de son avis. Pourquoi aurait-iel attendu pour venir l'aider ? Surtout, pourquoi aurait-iel fait tuer une fille pour ça ? L'adolescent avait dû accepter l'inévitable. On lui en voulait et il ne savait pas pourquoi.

    Xutik refusait encore l'idée que l'on veuille le tuer, plutôt qu'on avait essayé de le kidnapper pour une demande de rançon. Il avait écrit à ses parents, mais vu le sujet, il n'aurait pas été étonné que la lettre ne soit jamais partie. Ce qui se passait à l'école, restait à l'école. En fait, le jeune homme avait envoyé plusieurs lettres, changeant la formulation en espérant que l'une d'elle passerait. Il suffisait que ses parents soupçonnent qu'il y ait quelque chose de bizarre pour tenter d'agir.

    L’héritier d’or finit son assiette, fit sa vaisselle et rejoignit les autres dans le dortoir. Indilk et son amie s'étaient installés sur le même lit, tout au fond de la pièce. Elférad s'était allongé, à l'écart, les yeux au plafond, il semblait réfléchir. Xutik se choisit un lit et s'installa pour dormir.

    Il entendit d'autres élèves entrer tandis qu'il cherchait le sommeil, mais ne fit pas l'effort d'ouvrir les yeux pour voir s'il les connaissait. L'adolescent ne s'inquiétait pas d'une nouvelle tentative d'assassinat ou d'enlèvement.

    Des trois manières de s'élever, le meurtre était le dernier choisi. Parce que même s'il était réussi, le titre d'héritier revenait à la sœur ou au frère qui restait. Il fallait donc prévoir de se lancer dans une série de meurtre, dans le cas d'une grande famille ayant plusieurs enfants, et les espions en charge de ce genre de besogne n'étaient pas donnés. Pour Xutik, c'était différent. Fils unique, sa mort mettait sa famille en état de faiblesse, mais le clan les soutiendrait et les aiderait à trouver les coupables. Ceux-ci, s'ils étaient découverts, n'avaient aucune chance de survivre.

    C'est pourquoi un assassinat se prévoyait des années à l'avance. Il fallait des alliés au sein du clan visé pour qu'une fois l'héritier abattu, on puisse renverser le clan, prendre la place de la grande famille et que la nouvelle autorité ne soit pas contestée. Un simple assassinat coûtait du temps et de l'argent, aussi, c'est pourquoi Xutik pensait que l'on avait plutôt tenté de l'enlever. Sans doute pour une rançon. De toute façon, si on a tenté de me tuer, ils n'auront pas de quoi le retenter de sitôt.

    Xutik, en revanche, avait de quoi se payer un espion et il ne s'était pas gêné. Une fois que Gec-Nüj réussi à le persuader que le danger était toujours présent. L'adolescent avait trouvé un mot dans son sac, un beau matin, sans qu'il ne sache d'où cela venait, ni quand il avait été glissé là. Un espion lui faisait savoir qu'il prenait en charge sa demande. Dès lors, Xutik avait attendu. C'était l'espion qui entrait en contact s'il y avait besoin, lui qui décidait où et quand ils devraient se rencontrer. Comme ce soir-là. L’héritier d’or était au rendez-vous, il était à l'heure, mais l'espion n'était pas venu. Il avait attendu, longtemps et avait fini par se retrouver enfermé dehors.

    L’adolescent se réveilla un peu perdu et mit quelques secondes à se souvenir qu'il était à l’hôpital. Une infirmière ne tarda pas à entrer :

    -Allez ! Tout le monde debout ! Le réfectoire est ouvert.

    Xutik grogna en battant son drap avec ses pieds pour s'en dégager. Il remarqua vaguement la présence d'élèves qu'il ne connaissait pas et sortit. Le réfectoire était presque vide quand il entra. Le garçon mangea rapidement pour pouvoir rejoindre sa chambre et dormir encore. C'était leur deuxième jour de repos et il préférait être d'attaque pour ce qu'il avait imaginé durant la nuit.

    Finalement, après son repas, il se sentit parfaitement réveillé et décida de ne pas perdre de temps. Son plan était simple. Si Weikom avait les informations, il irait les lui demander.

    -Xutik ! Où tu vas ?

    Il sursauta en entendant Gec-Nüj l'appeler et se retourna pour le voir arriver en courant presque.

    -T'étais où hier ?

    Xutik se décomposa en se rappelant de sa mésaventure de la veille :

    -M'en parle pas. J'avais rendez-vous avec un espion qui n'est jamais venu. Ça commence à me courir qu'on me pose des lapins.

    Son ami le fit revenir au début :

    -Rendez-vous avec un espion ? Pourquoi tu ne m'en a pas parlé ? T'aurais pas dû y aller seul, ça aurait pu être un piège.

    Xutik haussa un sourcil :

    -Je t'en ai parlé... pendant que tu lisais.

    Les épaules de Gec-Nüj s'affaissèrent pendant qu'il prenait un air qui signifiait clairement "sérieusement ?". Xutik se défendit :

    -C'était un rendez-vous avec un espion. Il ne se serait sans doute pas montré si tu avais été là.

    Son ami écarta les bras :

    -Et ça a mieux marché sans moi ?

    -Bah, ça n'aurait rien changé avec.

    Gec-Nüj admit qu'il avait raison :

    -Du coup, on fait quoi ? Si l'espion n'a pas pu venir, c'est que c'est une affaire grave, non ?

    Xutik leva un doigt :

    -Ce n'est pas forcément mon affaire qui est grave. Peut-être qu'il a été retenu ailleurs.

    L'adolescent abandonna l'idée de lui faire comprendre qu'une tentative de meurtre était déjà grave, en sachant qu'il tentait toujours de nier l'évidence.

    -D'accord, on fait quoi ?

    Xutik demanda :

    -T'as mangé ?

    Gec-Nüj secoua la tête :

    -Je te cherchais. On fait quoi ?

    Xutik pointa le buffet du petit-déjeuner :

    -Tu veux pas manger, d’abord ?

    Son ami s'agaça :

    -Après, dis-moi ce que t’allais faire, là !

    Xutik se décida à lui répondre :

    -On part à la chasse aux secondes années.

    -Certains en particulier ?

    Xutik acquiesça :

    -Le deuxième de la hiérarchie des Cinq.

    -Ah quand même.

    -Ouais.

    Ils se mirent en quête du garçon à travers les parcs et les bâtiments. Il aurait été sans doute plus simple d'aller directement à sa chambre, mais ils ne tenaient pas à attirer l'attention sur eux plus que nécessaire. De plus, ils partaient du principe qu'un jour de repos où il faisait beau, ils le trouveraient sans doute dehors.

    -Xutik, attends.

    Ils traversaient les pelouses qui séparaient les bâtiments des classes des dortoirs pour la seconde fois quand Gec-Nüj le tira brusquement derrière un arbre :

    -Qu'est-ce qu'il y a ?

    Il se pencha pour voir ce que son ami pointait du doigt. Hiloy se tenait devant un banc où les Quatrièmes étaient assis. Xutik ne vit pas le problème :

    -Bah quoi ?

    Gec-Nüj garda les yeux sur le trio en répondant :

    -Ça fait un moment que j'y pense, mais tu trouves pas ça bizarre qu'iel s’intéresse à la mort de cette fille ?

    Xutik se souvint du moment où iel était venu.e les interroger. Il s'était aussitôt montré méfiant. En quoi cette fille pouvait intéresser lae Cinquième ? Ce n'était sûrement pas un hasard. Seulement, comme rien de nouveau n'était arrivé, il avait supposé qu'iel avait abandonné, que cela n'avait été qu'une curiosité d'un moment.

    -J'y ai pensé, oui, mais bon. Iel n'a pas l'air particulièrement investi non plus.

    Son ami restait concentré :

    -Ça ne veut rien dire.

    -C'est quoi ta théorie ?

    L'héritier d'argent détacha enfin son regard du trio pour se tourner vers lui :

    -Peut-être qu'iel la connaissait. Peut-être qu'iel veut se venger.

    Xutik fronça les sourcils :

    -Je ne crois pas. Tu ne l'as pas vu le soir où on m'a attaqué. Iel était chamboulé.e, c'est sûr, mais pas au point de laisser penser qu'iel venait de voir une connaissance mourir.

    Son ami insista :

    -Iel joue peut-être très bien la comédie.

    L'héritier d'or resta dubitatif :

    -Mouais. Cette fois, je crois que c'est toi qui déconnes.

    Le garçon ne répondit pas et comme le silence s’étirait, Xutik reprit :

    -Bon, on va pas s'éterniser. On a un seconde année à trouver.

    Gec-Nüj réagit :

    -C'est vrai et qui de mieux pour nous diriger que ceux qui le connaissent.

    Xutik se pencha pour observer le trio. Hiloy peut-être pas, mais c'est vrai que les jumeaux peuvent le connaître. Il fit un pas hors de leur cachette, mais Gec-Nüj le ramena soudainement derrière l'arbre :

    -Qu'est-ce que tu fais ?

    L'héritier d'or ouvrit des yeux écarquillés de surprise :

    -Bah, je vais leur demander.

    Son ami secoua la tête :

    -Attends. On va voir ce qu'ils font.

    -Comment ça ?

    L'héritier d'argent sourit :

    -Tu ne t'es jamais demandé ce que les Cinq feraient le jour où ils se rencontreraient ? Ils ont tous grandi dans leur coin, en sachant que les autres existaient. Tu ne te demandes pas de quoi ils parlent ?

    Xutik dévisagea son ami d'un air amusé :

    -Pas tellement, non.

    Il se pencha néanmoins pour apercevoir le trio. De loin, il était difficile de dire qu'Oru était une fille. Sa carrure n'aidait pas vraiment. Elle écrivait frénétiquement dans un carnet, ignorant les deux autres qui s’agitaient auprès d'elle. Enfin, Tefpiro s'agitait tandis qu'Hiloy se contentait de rester immobile.

    -De quoi ils parlent à ton avis ?

    Gec-Nüj se concentra quelques instants avant de dire :

    -Je n'arrive pas à entendre ce qu'ils se disent.

    Xutik entendait la voix agacée de Tefpiro et celle, calme et posée d'Hiloy, mais il ne réussit à distinguer aucunes paroles. Oru finit par se lever et présenta son carnet à lae Cinquième qui sourit en lisant. Elle est mignonne quand même. L’héritier d’or sourit :

    -Tu crois que je devrais lae demander en mariage en fin d'année ou j'attends les trois ans ? Iel risque de se faire tuer entre temps. Il vaut mieux pas attendre, non ?

    Gec-Nüj laissa échapper un grondement entre ses dents serrées et leva les yeux au ciel :

    -Tu ne vas pas épouser lae Cinquième.

    Xutik soupira :

    -Pourquoi faut-il que tu sois si pessimiste ?

    -Iel ne voudra pas t'épouser, c'est tout. On peut s’intéresser à ce qu'il se passe maintenant ?

    L'héritier d'or revint au trio à temps pour les voir se mettre en mouvement. Tefpiro resta un instant en arrière à crier :

    -Ce n'est pas comme ça que doit marcher l'Union !

    Il finit par rejoindre sa sœur et Hiloy. Gec-Nüj saisit l'épaule de son ami :

    -T'as entendu ?

    -Ouais. Ça veut dire quoi à ton avis ?

    Son ami gardait les yeux sur les trois qui s'éloignaient :

    -J'en sais rien, mais si une union se forme entre les Cinq, ça risque de ne pas être bon.

    Xutik trouva qu'il sautait un peu vite au conclusion, mais ne dit rien. Gec-Nüj le saisit par le bras :

    -Viens, on les suit.

    L'héritier d'or se laissa entraîner. Ils avaient peut-être une chance de trouver Weikom. Il fit remarquer tout de même :

    -Ce serait plus simple de leur demander où trouver le Deuxième, non ?

    Son ami contra en répondant :

    -Et s'ils refusent ? S'ils nous mentent ?

    Xutik avoua que c'était une possibilité. Les trois avaient atteint la bibliothèque, le duo sur leur talons. Gec-Nüj passa la porte et se figea. Son ami manqua lui rentrer dedans :

    -Qu'est-ce qui te prend ? Pourquoi tu t'arrêtes ?

    -Parce qu'il n'y a plus personne devant.

    La voix à son oreille lui fit faire un bond.

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