• XXIV - Hiloy : Pour une fois qu'il n'y a pas que moi

    Hiloy Plilaz

    Rang : Or

    Héritière de la grande famille Plilaz

    Héritière de la charge de gardien

     

    Hiloy sentit la chaise la frôler tandis qu'elle poussait Indilk hors de la trajectoire. Quand ils se retrouvèrent tous les deux au sol, la Cinquième se tourna vers Tahiya pour prévenir une nouvelle attaque, mais ce fut l'adolescent qui la repoussa d'un coup de pied. Le souffle coupé, Hiloy tenta de s'éloigner alors qu'Indilk se redressait déjà.

    A ce moment, Citseko intervint à son tour, passant un bras autour du cou du garçon et bloquant son bras levé pour frapper. Ainsi paralysé, Indilk gronda de colère. De son côté, Tahiya s'avançait pour en finir. Hiloy retrouva son souffle, leva les mains pour les apaiser l'un et l'autre et dit :

    -Ça suffit. Ça suffit.

    Il n'y avait pas une once d'autorité dans sa voix, seulement une pure frayeur. Ils s'immobilisèrent, pendant qu'Hiloy passait son regard des uns aux autres, soulagée qu'ils n'aillent pas plus loin. Elle ne cherchait pas à cacher qu'elle avait peur de se retrouver dans la mêlée, en fait, Hiloy avait le sentiment qu'un ton plus autoritaire n'aurait qu'augmenté leur agressivité.

    Tahiya fut la première à retourner s’asseoir, croisant bras et jambes pour marquer son mécontentement. Sentant qu'Indilk se détendait, Citseko le libéra doucement. Chacun retrouva sa place et garda le silence durant le reste de leur Enfermement qui dura quelques heures.

    La Cinquième fut soulagée de voir la porte s'ouvrir et rejoignit sa chambre sitôt qu'elle vit que l'heure du dîner allait bientôt sonner. Si je me dépêche, je pourrais avoir fini mes devoirs avant. Bien que ce fut ce qu’elle avait en tête, Hiloy se doutait bien qu'elle ne finirait pas dans les temps et se préparait déjà à devoir se coucher tard.

    C'est avec soulagement qu’Hiloy retrouva sa chambre. Balançant son sac par terre, l’adolescente se jeta sur son lit immense et resta un instant immobile, laissant vagabonder ses pensées. La Cinquième espéra que la façon dont elle était intervenue, dans la lutte entre Indilk et Tahiya, n'allait pas lui apporter de problèmes quelconques. Elle avait vu comment la réputation de Xutik s'était faite après seulement un Enfermement. Maintenant, les héritiers d'argent lui jetaient des regards noirs et les héritiers d'or le méprisaient. Non pas que cela ait l'air de le déranger, il semblait se moquer complètement de ce que les autres pensaient de lui. En même temps, si on avait essayé de me tuer, je pense que mes priorités ne seraient pas non plus le regard des autres. Cela l’amena à repenser à la façon dont cette histoire s'était éteinte rapidement. Hiloy s'était imaginée qu'il y aurait une enquête, des recherches, que des tas de gens seraient interrogés, mais il ne s'était rien produit de tel. Même Xutik semblait être passé à autre chose. A croire qu'il n'y ait que moi qui continue à faire des cauchemars. Elle n'avait pas vu la chute de la fille, mais son corps inerte et brisé suffisait à la hanter.

    Il s'en était fallu de peu qu'elle ne voit pas le combat ce soir là. Hiloy bloquait sur un devoir et avait décidé de prendre l'air à la fenêtre. Elle n'avait pas avoué à Xutik qu'elle avait hésité. Pendant quelques secondes qui lui avaient paru des minutes, la Cinquième avait hésité à aller l'aider. Hiloy avait craint qu'on ne s'en prenne à elle ensuite et Xutik ne s'était pas vraiment montré amical envers sa personne. Trop amical, plutôt. Rien ne lui prouvait que le garçon n'était pas en tort dans cette histoire. Mais finalement, elle y était allée. Hiloy s'était précipitée dans le couloir avant même de s'en rendre compte et avait assommé l'espion aisément.

    -Au boulot, maintenant. Ça suffit. Fénéante, va.

    L'adolescente se leva, optant d'abord pour l'abandon de son uniforme au profit d'un jean et d'une chemise. Elle rejoignit ensuite, son bureau, jeta un œil à la liste de ses devoirs, sortit un livre, ouvrit un cahier, puis sa porte s'ouvrit. Falibi se pencha, laissant sagement ses pieds hors de la chambre :

    -Je peux entrer ?

    Hiloy sourit :

    -Tu es bien avancée.

    La jeune fille fit un pas dans la pièce :

    -Je viens te proposer de nous rejoindre, Rafirin et moi, dans la pièce commune. On va faire nos devoirs ensemble.

    Hiloy hésita avant de répondre :

    -Bah, j'ai pas trop envie. J'en ai un peu marre de devoir amuser les secondes années.

    Un large sourire s'étendit sur le visage de l'adolescente :

    -Mais on ne va pas dans la pièce commune de l'école. On va dans celle réservée aux premières années.

    Hiloy lâcha son crayon en prenant un air ébahi :

    -Il y a... une salle... pour les premières années ?

    Falibi hocha solennellement la tête. Hiloy commença à ranger ses affaires, mais son amie l'arrêta :

    -Prends juste de quoi écrire, on a déjà ramené nos livres.

    Hiloy prit le nécessaire et ils quittèrent la chambre.

    -Comment s'est passé ton Enfermement ?

    La Cinquième eut un rire jaune :

    -Moins bien que le premier.

    Elle raconta ce qu'il s'était passé et Falibi se mit à rire :

    -Heureusement que vous n'y étiez que pour quelques heures.

    Hiloy rit aussi à l'idée d'un silence pesant qui aurait pu durer des jours. Arrivées au rez-de-chaussée, elle s'apprêtait à sortir, mais Falibi lui attrapa le bras :

    -Pas par là.

    La Cinquième se laissa guider vers une porte sous l'escalier menant aux dortoirs. Une autre volée de marche apparut, derrière celle-ci, qui descendait dans un sous-sol.

    -C'est en bas ?

    Falibi prit un air mystérieux :

    -C'est en bas.

    Elles dévalèrent les marches pour déboucher dans un tunnel. Après avoir avancé de quelques pas, une musique leur parvint. Falibi s'arrêta devant la seule porte du couloir, l’ouvrit d'un geste théâtral. Hiloy entra dans une vaste salle où les premières années, en uniforme ou tenue décontractée, s'étaient réunis autour de larges tables rondes. Elle vit des distributeurs, des bibliothèques, une télé et des consoles de jeux.

    -Ça fait pas mal de bordel tout ça.

    Rafirin, installé sur un canapé, leur fit de grands gestes. Hiloy continua alors qu'elles allaient le rejoindre :

    -Tu ne crois pas que l'on va avoir du mal à se concentrer ?

    Falibi répondit à la question en s'adressant à ses deux interlocuteurs :

    -C'est vrai. Et puis, sur un canapé, ça ne va pas être pratique.

    Hiloy allait proposer qu'ils se rendent à la cafétéria et tant pis pour les secondes années, mais Falibi reprenait déjà :

    -On a qu'à aller dans l'autre pièce.

    Rafirin fit une grimace :

    -Tu ne crois pas que je vais faire tâche ?

    Hiloy était perdue :

    -Quelle autre pièce ? Il y en a combien ? De pièces ?

    Reprenant son air mystérieux, Falibi lui fit signe de la suivre. Sous la grande mezzanine de la salle, six portes étaient alignées sur le mur arrondi. Hiloy aperçut une panthère sur l'une d'elle. Falibi expliqua avec une pointe de fierté :

    -Voici la pièce réservée à notre classe.

    Hiloy jeta un regard à Rafirin que Falibi surprit :

    -Et nos invités de marque, évidemment.

    Elle passa la clé de sa chambre dans la serrure électronique et la porte s'ouvrit. Elle allait entrer, mais Rafirin l'arrêta :

    -Je devrais passer devant pour vérifier qu'il n'y a pas de pièges

    Falibi eut un sourire qui tendait à être mauvais :

    -Bien sûr, Rafirin, mais tu as oublié de fouiller Hiloy. Tu te ramollis mon grand.

    Le garçon ne s'offusqua pas et se contenta de répliquer :

    -Elle est notre amie. Je ne vais quand même pas la fouiller.

    L'adolescente se pencha vers lui pour murmurer d'un ton conspirateur :

    -Mais, elle fait peut-être ça pour gagner notre confiance, avant de nous poignarder dans le dos.

    Rafirin chercha une réplique cinglante, n'en trouva pas et se contenta d'observer Hiloy comme s'il commençait à douter d'elle. Celle-ci passa entre eux, habituée à ce genre de discussion qu'ils avaient régulièrement, pour découvrir la nouvelle pièce. C'était une réplique de celle qu'elle venait de quitter excepté que l'espace en était plus restreint, qu'il n'y avait que vingt fauteuils et que les tables étaient plus petites. Un autre point en sa faveur, c'était qu'elle était vide.

    Hiloy aurait pu sauter de joie :

    -C'est trop cool.

    Elle alla directement vers la bibliothèque pour y découvrir les livres qui s'y trouvaient. Falibi et Rafirin se turent quand elle< passa entre eux, puis ils allèrent s'installer à une table.

    -On commence ?

    Hiloy s'arracha à la contemplation de la bibliothèque pour les rejoindre. Ils travaillèrent plus lentement que s'ils avaient travaillé chacun dans leur chambre, mais c'était toujours moins ennuyeux. Ils durent s'arrêter rapidement pour aller dîner, mais revinrent aussitôt après. Quand ils eurent terminé leur travail, ils restèrent à discuter.

    Le son de la serrure électronique leur fit tourner la tête. Matior et Lyert déboulèrent dans la pièce, se poussant l'un l'autre. Matior se rattrapa de justesse à la poignée alors que son ami s'étalait par-terre en geignant. Elférad l’enjamba en soupirant :

    -Vous êtes vraiment trop cons.

    Il se dirigea sans hésiter, comme quelqu'un qui a l'habitude, vers la télé et alluma la console. Il aperçut les trois occupants de la salle en se retournant :

    -Oh. Ça vous dérange si on joue ?

    Hiloy consulta ses amis du regard et Falibi répondit :

    -Non, c'est bon.

    Neghttris et Gzadien avaient déjà rapproché des fauteuils devant l'écran. Matior aida Lyert à se relever et ils s'installèrent. Les trois amis restaient silencieux, les regardant faire. Neghttris annonça :

    -On fait des équipes de deux. Le plus haut score l'emporte.

    -Hiloy ?

    La Cinquième, affalée sur la table, se tourna vers Falibi :

    -Mmh ?

    -Je me demandais si tu parlais encore avec les jumeaux.

    Hiloy chercha à se souvenir de la dernière fois qu'elle les avait vu :

    -Ça fait un moment. Pourquoi ?

    Rafirin et la jeune fille échangèrent un regard avant que Falibi ne dise :

    -On aurait voulu des informations sur les Grands Jeux.

    Hiloy se redressa :

    -Vos parents vous en ont pas parlé ?

    Pour une fois qu'il n'y a pas que moi. Rafirin expliqua :

    -En fait, les règles des Grands Jeux changent régulièrement. On pensait qu'en sachant ce qu'ils avaient eu l'année dernière, on aurait pu essayer de deviner ce qui nous attends.

    Ça tient debout.

    -Mais, ça peut être quoi comme genre de jeu ?

    Falibi répondit :

    -Eh bien, ça peut être n'importe quoi. Une fois, les élèves ont été enfermés dans des avions et ils devaient décrypter des codes pour ouvrir les portes. Une autre fois, on leur a donné à chacun une arme et ils ont dû se battre contre des Bestioles pour partir.

    Rafirin compléta :

    -Ça peut être inoffensif ou entraîner la mort de dizaines d'entre nous.

    Hiloy déglutit avec difficulté :

    -Mais, le but de l'école n'est pas de nous tuer. Pourquoi ils créeraient des jeux qui peuvent nous tuer ?

    Falibi soupira :

    -C'est vrai, mais n'oublie pas que les adultes sont achetables aussi. Pour peut qu'une famille veuille se débarrasser d'un héritier, le Grand Jeu est l'occasion idéale. De plus, si un accident ou deux arrivent, ce ne seront que des dommages collatéraux.

    Hiloy était sous le choc :

    -Dommages collatéraux ? C'est ce qu'ils disent aux familles ?

    Rafirin ricana :

    -Le prix à payer pour être dans cette école. Ils disent aux familles qu'ils sont morts, ils n'ont pas à donner de raison. Après tout, les Grands Jeux sont énormes, allaient savoir qui meurt par qui ou quoi.

    L'humeur d'Hiloy s'était passablement assombrie. C'était une chose de se faire tuer par un héritier adverse, c’en était une autre de se faire tuer par une mauvaise gestion des dirigeants de l'école. Des cris se firent entendre dans le coin vidéo et leur attention se reporta sur l'écran. Hiloy aperçut le jeu qui défilait et sourit. Falibi le remarqua :

    -Tu connais ?

    Son amie hocha la tête :

    -On y jouait avec ma mère quand j'étais petite.

    Le visage de Falibi s'illumina :

    -Alors, qu'est-ce qu'on attend ?

    Hiloy sursauta :

    -Comment ça ?

    Falibi était déjà debout et s'avançait vers les garçons. Hiloy se tourna vers Rafirin qui haussa les épaules :

    -Je vais rester là, histoire d'assurer ses arrières.

    La Cinquième eut un léger rire, se leva, lui saisit le bras et le traîna vers leur amie qui lançait :

    -On peut jouer avec vous ?

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