• Dans son rêve, Hiloy s'approcha de la fille qui avait sauté. Non, pas sauté, on l'a poussé. Cette correction lae rendit réticent.e à s'avancer encore. C'est pour détourner mon attention. Il y a quelqu'un qui attend de me sauter dessus. Iel en était sûre, même si iel ne savait plus trop comment. Son corps refusa de regarder autour d'ellui et ses jambes se remirent en mouvement vers le corps, alors même qu'iel voulait faire demi-tour. Cependant, tandis qu'il ne lui restait qu'un pas à faire pour être à la hauteur de la jeune fille, celle-ci se redressa en souriant. Hiloy laissa échapper un soupir de soulagement. Elle n'est pas morte. Évidemment, je suis bête, on ne meurt pas comme ça. Comme si elle avait lu dans ses pensées, la fille dit soudainement :

    -Ce n'est pas comme si quelqu'un en avait quelque chose à foutre que je meurs.

    Hiloy se réveilla, le cœur dans la gorge, au bord des larmes. Pourquoi personne ne cherchait à savoir qui l'avait poussé ou pourquoi ? Fixant un point dans l'obscurité, iel resta parfaitement immobile, écoutant sa respiration. Tu n'en sais rien, peut-être que ses amis et ses parents font des recherches. Lae Cinquième se demanda si Xutik ne se posait pas également ces questions. Après tout, il l'avait vu tomber lui. Il n'était pas possible qu'il soit passé à autre chose avec tant de facilité. Iel resta un long moment sans sommeil, à suivre le cours de ses pensées. Quand Hiloy se rendormit, se fut avec la ferme intention de découvrir qui avait tué la jeune fille. Avec un peu de chance, cela arrêterait les cauchemars.

     

    Quand iel arriva en classe, le lendemain, Hiloy découvrit une rose sur sa table. Iel observa la fleur avec perplexité. Je suis censé.e en faire quoi ? En s'asseyant, Falibi ouvrit de grands yeux émerveillés :

    -Woah, on t'a offert une rose !

    Hiloy rit de la réaction de son amie et s'assit en disant :

    -T'as vu ça. J'en fais quoi à ton avis.

    Falibi se mit à rire :

    -Bah, tu la mets dans un vase, cette question.

    Hiloy grimaça :

    -Pour faire quoi. Ça sert à rien. Si je veux voir des fleurs, je vais dans le parc.

    Son amie leva les yeux au ciel :

    -Ah là là, ces gens qui ne savent pas apprécier les cadeaux. Tu vois, moi, si on m'offrait une rose. Je serais très contente.

    Hiloy observa l’adolescente avec attention, un sourire en coin, tandis qu'elle continuait de parler en bougeant ses affaires sans raison :

    -Si on m'offrait une rose, je serais très contente. Je pourrais la mettre sur le bureau de ma chambre. C'est tellement jolie les roses. Je t'ai dit que c'était ma fleur préférée ? Bon, peut-être pas ma préférée. J'ai un faible pour les œillets, mais elle arrive au moins seconde. On ne m'a jamais offert de fleurs à moi. Même pas Rafirin. Je devrais peut-être lui en parler d'ailleurs.

    -Falibi ?

    Elle se tourna vers Hiloy d'un air ingénu :

    -Oui ?

    -Je viens de trouver cette rose qui a dû chuter par inadvertance sur mon bureau. Elle m'a, bien sûr, de suite fait penser à toi. Alors, je te l'offre.

    Falibi joua la surprise :

    -Pour moi ? Oh, comment tu as su ?

    Elle s'empara de la fleur qu'Hiloy lui tendait et ils se rendirent compte au même moment que la classe les observait. Voyant qu'ils se taisaient, le professeur Irdrour leur demanda :

    -Nous pouvons commencer ?

    Sans se départir de son lumineux sourire, Falibi répondit :

    -Je vous en prie. Merci de votre patience.

    Irdrour laissa échapper un sourire avant de commencer le cours. Hiloy passa, une bonne partie de la leçon, à se demander comment iel pourrait aborder Xutik, sans que celui-ci se fasse de fausses idées. Lae Cinquième voulait savoir s'il faisait des recherches sur la personne qui avait tenté de le tuer. Si c'était le cas, il y avait des chances pour qu'il se soit renseigné sur ce qui était arrivée à la fille. Ouais, mais si je commence à lui parler, il va nous croire marié. Iel soupira, découragé.e.

    La sonnerie retentit, annonçant la pause. Hiloy s'étira avant de s'affaler sur son bureau :

    -Tu manges avec Theaon ce midi ?

    Falibi se figea :

    -C'est ce que j'avais prévu, mais si tu veux...

    Hiloy l'arrêta :

    -Non, y a pas de problème. C'est juste pour savoir. Si Rafirin mange avec ses amis, je prendrais peut-être juste un truc à la cafét’.

    Falibi posa sa tête sur le bureau pour être face à Hiloy :

    -T'es sûre ?

    Lae Cinquième leva un pouce en l'air :

    -Certain.

    L'adolescent.e resta là en espérant rattraper un peu du sommeil qu'iel n'avait pas eu durant la nuit. Les cours lui semblèrent deux fois plus longs avant le déjeuner. Mais, la sonnerie finit par se faire entendre.

    Hiloy laissa ses affaires dans le sac et se dirigea vers la sortie. Falibi lui lança :

    -Tu peux venir manger avec nous, si tu veux.

    L’adolescent.e lui sourit :

    -T'inquiètes. Je vais pas en mourir.

    Iel sortit dans le couloir à la recherche de Xutik et finit par le retrouver sur le chemin du réfectoire. Bon, allez. Ce n'est qu'un mauvais moment à passer.

    -Xutik ?

    Le garçon se retourna à son nom et ne sembla pas surpris de lae voir :

    -Hiloy. La rose t'a plu ? Tu manges avec nous ?

    Gec-Nüj fronça le nez en entendant la proposition. Lae Cinquième continua, ignorant ses questions :

    -Je voulais te parler de la fille qui est morte.

    Xutik s'assombrit :

    -Pourquoi ?

    Hiloy fut surprise de sa réaction :

    -Eh bien, parce que c'est sans doute lié à la personne qui a essayé de te tuer. Je voulais savoir si tu avais des informations.

    Iel vit le soupçon passer sur le visage de Gec-Nüj. De son côté, Xutik haussa les épaules :

    -J'ai rien. J'ai pas cherché.

    Hiloy n'en crut pas un mot :

    -On essaie de te tuer et tu ne cherches pas qui est derrière ça ?

    Il eut un large sourire qui n'atteignit pas ses yeux gris :

    -Que veux-tu, c'est le prix à payer pour s'élever.

    Il s'éloigna avant qu'iel ne puisse ajouter quoique ce soit. Cependant, Hiloy ne se laissa pas abattre. Iel avait d'autres personnes à interroger. Mais pour l'instant, on va manger où on ne tiendra pas l'après-midi. La cafétéria était plus peuplée qu'iel ne l'avait imaginé. Principalement par des élèves venus travailler en mangeant.

    -Hiloy ?

    Lae Cinquième sursauta, ne s'attendant pas à entendre la voix de Rafirin. Il lae rejoignit :

    -J'ai croisé Falibi qui m'a dit que tu irais probablement ici. On mange ensemble ?

    Hiloy hocha la tête et demanda avec une pointe de moquerie :

    -Tu n'angoisses pas de laisser Falibi seule avec Theaon ?

    Rafirin fit la moue :

    -Elle m'a encore rembarré.

    Hiloy lui sourit avec douceur :

    -En même temps, qu'est-ce que tu veux qui arrive ? Qu'elle lui plante une épingle à cheveux empoisonnée dans le bras ?

    L'adolescent.e se reprit :

    -Elle pourrait directement empoisonner le plat, ce serait plus discret.

    Rafirin pâlit :

    -Je vais allé manger là-bas. Juste pour être sûr. Histoire de l'avoir à l’œil.

    Hiloy lui agrippa le bras :

    -Non, non, laisse-la. Je plaisante.

    Le garçon n'était pas convaincu :

    -On ne sait jamais...

    Iel le tira jusqu'à une table :

    -Si, on sait. Allez, laisse-la donc un peu tranquille. Si tu l'empêches de réaliser son rêve, elle risque fort de t'arracher la tête.

    Rafirin ne trouva rien à redire là-dessus et accepta de s'asseoir pour manger.

    De retour en classe, Hiloy aperçut Falibi à la table de Theaon. Son amie lae rejoignit avec un air contrit :

    -Ça te dérange si je change de place ?

    Hiloy lui sourit :

    -Non, pas de problème.

    Iel alla s’asseoir à sa place et salua l'adolescente qui venait s'installer. Celle-ci lui lança :

    -Salut, Hiloy. Je m'appelle Ora.

    Un coup de règle sur le bureau les empêcha de faire plus amples connaissances. Hiloy n'eut pas à se plaindre de ce changement de voisine. Contrairement à Falibi qui avait des tendances à discuter, Ora restait silencieuse. Elle se penchait régulièrement sur les notes d'Hiloy, mais restait le reste du temps dans son coin.

    A la fin des cours, Hiloy sortit sans prendre le temps d'avertir Falibi qui était, de toute façon, en grande discussion avec Theaon. Pour la première fois de l'année, iel se rendit au dortoir des secondes années. Lae Cinquième ne savait pourquoi iel avait été persuadé.e que les dortoirs étaient strictement réservés aux personnes qui y vivaient, mais si Mechem avait pu venir la veille sans que cela ne fasse scandale, iel pouvait en faire autant. Hiloy passa par sa chambre pour retirer son uniforme et enfiler des vêtements civils. Au moins comme ça, j'échapperais à ces foutus souhaits. Cela n'empêcha pas son cœur de battre à cent à l'heure quand iel se trouva devant la porte du bâtiment.

    Lae Cinquième hésita un bon moment avant de se décider à franchir le pas. L'adolescent.e marcha dans les couloirs, tête baissée comme si cela pouvait lae rendre invisible. Le bâtiment était identique à celui des premières années et iel se retrouva sans difficulté.

    Hiloy monta les marches en se demandant à quel étage se trouvait les chambres des jumeaux et s'arrêta au premier palier lorsqu'iel tomba face à une porte portant le chêne des Jyu. Iel frappa. Personne ne répondit. Hiloy sentit des regards peser sur ellui tandis qu'iel toquait à nouveau à la porte des Quatrièmes. Pour le peu qu'iel connaissait les jumeaux, l'adolescent.e se doutait qu'ils ne devaient pas avoir beaucoup de visites. Toujours aucune réponse. Hiloy commença à se demander si iel devrait repasser. Dommage, j'étais prête psychologiquement, là. L'adolescent.e laissa échapper un soupir et fit volte-face. Son regard s'arrêta sur un jeune homme au bas de l'escalier.

    Lae Cinquième ne se serait sans doute pas attardé.e si celui-ci ne l'avait pas fixé intensément. Qu'est-ce qu'il me veut ? Il ne fit pas un geste, ne dit rien, se contentant de rester les mains dans les poches. Hiloy se décida à descendre, détournant le regard en espérant au fond d'ellui qu'il lae prenait pour quelqu'un d'autre.

    -Puîné.e.

    Hiloy grimaça. Iel ne voyait pas à qui cela pouvait faire référence à part ellui. Faisant face au garçon deux fois plus grand qu'ellui, Hiloy aperçut l'hydre d'or aux cous de diamant en blason. Tgeork, le Troisième. L'adolescent.e observa avec plus d'attention l'adolescent. Il avait des cheveux en brosse, mêlant orange pâle et blanc. Des sourcils broussailleux au-dessus de deux grands yeux d'un bleu glacé. Une mâchoire carrée qui lui donnait un air autoritaire. De manière générale, il ne ressemblait pas à quelqu'un qui s'amusait beaucoup. En fait, iel lui trouvait une ressemblance avec Indilk et ce n'était pas pour la rassurer.

    -Les jumeaux ont dit que tu voulais faire des duels.

    Hiloy s'empressa de dire :

    -C'est vrai, mais ils m'ont expliqué pour l'Union. J'ai signé aussi.

    Il tourna les talons en lui lançant :

    -Rien à foutre, ramène-toi.

    Hiloy hésita avant de le suivre :

    -On va où ?

    Le troisième lae mena dans la cour intérieure du dortoir et se plaça au centre :

    -Mets-toi en garde.

    Iel le fixa avec des yeux ronds :

    -Mais... je croyais qu'on ne pouvait pas à cause de l'Union.

    Il serra les mâchoires :

    -Si tu veux te battre et moi aussi, ça ne va pas à l'encontre de l'Union.

    Hiloy fronça le nez :

    -Je ne suis pas sûre.

    -Tu vas laisser passer ta chance ?

    Lae Cinquième se frotta le cou avec embarras. Si iel se battait, au moins, son père ne pourrait pas dire qu'iel n'avait pas essayé. Hiloy s'avança et se mit en garde.

    Parler de duel aurait sans doute était un peu exagéré. Quand il chargea, Hiloy ne put que se maintenir en défense. Iel évitait un coup de poing pour mieux recevoir un genoux dans le ventre. Iel se baissait pour éviter un coup de coude et se retrouvait au sol, fauché.e par une jambe. Iel se relevait pourtant. Le goût du sang dans la bouche, la sueur lui piquant les yeux, lae Cinquième s'efforçait de rester concentré.e. Au début, iel avait espéré jouer de vitesse, mais malgré sa masse, l’adolescent restait vif. Hiloy avait ensuite opté sur la longueur, espérant qu'il finirait par se fatiguer, mais il ne semblait pas flancher. Iel n'avait aucune ouverture qui aurait pu lui donner l'espoir de porter un coup. Hiloy aurait pu abandonner, mais iel entendait déjà son père hurler d'humiliation.

    L'adolescent.e finit par tenter le tout pour le tout. Iel vit le poing arriver et baissa sa garde. Le garçon sentit le danger, mais ne retira pas son bras assez vite. Lae Cinquième enroula son bras autour du sien, saisissant son col de sa main libre. Iel ne put achever son attaque. Le Troisième saisit son poignet, tira sur son bras pour lae ramener vers lui alors qu'il lui envoyait son front dans le nez. Hiloy n'eut pas le temps de crier qu'un deuxième coup l'atteint au visage. Iel chercha à s'écarter pour reprendre sa garde, mais il ne lae laissa pas faire et enchaîna les coups jusqu'à ce qu'iel se retrouve au sol.

    Incapable de se relever, lae Cinquième vit l'adolescent s'éloigner tranquillement. Iel rassembla ses dernières forces pour cracher une dent avant de se laisser retomber et de fermer les yeux.


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