• Chapitre 15

    Gardia jeta un coup d’œil par-dessus son épaule alors que Lutinor revenait en l’appelant :

    -Viens voir, viens voir.

    Il saisit le bras de la jeune femme pour qu’elle le suive, alors qu’elle échangeait un regard perplexe avec Charon. Lutinor était plutôt fier de son idée et traîna de toute ses forces la sans-âme qui ne semblait pas aussi pressé de savoir ce qu’il voulait lui montrer. Il lança à Charon :

    -Tu peux ramener Chaussette, s’il te plaît ?

    Il poussa Gardia dans la maison et ouvrit une porte qu’il venait de faire apparaître. Derrière se trouvait une chambre spacieuse avec un lit immense.

    -Tada ! Voilà ta chambre.

    Un regard vers la porte d’entrée l’informa que Charon arrivait avec un Chaussette rouge de colère d’être ainsi baladé. Ma surprise va le mettre de bonne humeur. Il se précipita vers une autre porte :

    -Et voilà pour toi, Chaussette !

    Une autre chambre apparut. Les deux sans-âmes étaient de nouveau sans voix alors que Charon croisait les bras :

    -On peut m’expliquer pourquoi leur lits sont plus grands que le mien ?

    Lutinor se figea. J’ai pas pensé à ça. Il tenta d’apaiser le sans-âme :

    -Je vais te faire une nouvelle chambre, d’accord, plus grande et plus belle que toute les autres.

    Charon plissa les yeux :

    -Y a intérêt.

    Gardia avait suivi la discussion sans en croire ses yeux et ses oreilles. Elle finit par intervenir :

    -Vous ne le punissez pas ? je veux dire, jamais ?

    Lutinor la dévisagea avec des yeux ronds :

    -Punir Charon ? Il a fait une bêtise ?

    La sans-âme tombait des nues :

    -Mais… la façon dont il vous parle ?

    Le petit dieu secoua la tête :

    -C’est pas sa faute s’il est ronchon. C’est pour m’aider à apprendre en plus, hein, Charon ?

    L’interpellé se contenta de ricaner. Lutinor s’avança vers Gardia et Chaussette :

    -Vous êtes contents ? comme si, un jour, Gardia, tu es fatiguée de dormir dans les marais ou si toi, Chaussette, tu en as assez de ta maîtresse, vous pourrez toujours venir ici.

    Gardia observa un long moment le petit dieu, puis son regard passa sur Charon et enfin Milen qui se tenait en retrait, fredonnant une chanson.

    -Vous voulez me faire rester ?

    Lutinor hocha la tête avec innocence :

    -Si tu veux. Si tu veux revenir demain ou dans un mois ou un an, c’est comme tu veux. Après tout, tu es libre maintenant, non ?

    Il sourit avec tant de sincérité que Gardia commença à percevoir ce qui avait tant attirer le grand Charon.

    -Je vais rester.

    Le petit dieu ne cacha pas sa surprise :

    -C’est vrai ? tu veux ?

    Elle hocha la tête.

    -Je suis curieuse.

    Lutinor parut perdu :

    -Curieuse de quoi ?

    Gardia se contenta d’échanger un regard entendu avec Charon sans répondre.

    -Moi, je rentre dès que je m’évade.

    Leur attention revint à Chaussette. Lutinor soupira :

    -Libère-le Charon, s’il te plaît.

    Charon ne réagit pas de suite, persuadé d’avoir mal entendu :

    -Que je quoi ?

    Le petit dieu lui lança un regard triste :

    -Libère-le. On ne va pas le garder toute la vie non plus et s’il veut être avec sa maîtresse, pourquoi on l’ne empêcherait ? je suis sûr que tu n’aimerais pas être emprisonné.

    Charon évita son regard en relâchant le petit sans-âme qui se releva avec hésitation :

    -Vous allez me laisser partir ?

    Lutinor lui tapota la tête :

    -Oui, mais n’oublie pas. Tu as une chambre à toi ici.

    Chaussette se dégagea, l’air mauvais avant de se précipiter vers la sortie en leur jetant des regards par-dessus son épaule pour être sûr de ne pas être suivi. Lutinor lâcha un profond soupir avant de retrouver son sourire :

    -Bon, on…

    Charon le coupa :

    -On continue ton entraînement. Va me chercher cette rune.

    Le sourire de Lutinor se crispa et il demanda entre ses dents :

    -Tu es sûr qu’on ne pourrait pas aller se promener ?

    Charon lui montra la sortir du doigt et Lutinor obéit, tête basse. Gardia retint le sans-âme un moment alors qu’il s’apprêtait à suivre le petit dieu :

    -Pourquoi ne restaure-t-il pas son temple s’il est capable de créer cette maison ?

    Charon n’eut pas besoin de réfléchir à la question :

    -Je crois qu’il n’a pas encore fait le rapprochement.

    Lutinor revint devant le mur et y resta le restant de la journée sans succès.

     

    Quand Gardia se leva le lendemain. Elle s’étonna d’abord d’avoir pu dormir d’une traite quand elle était habituée à se réveiller au moindre son suspect. Puis, elle dut prendre quelque minute pour se souvenir de l’endroit où elle se trouvait. Elle se leva avec lenteur s’attendant à se retrouver emprisonner dès que ses pieds toucheraient le sol. Rien ne se produisit et elle sortit de sa chambre afin de regagner les marais et monter la garde. Si ce que disait Charon était vrai, elle avait tout intérêt à garder Lutinor sauf. Un dieu bon leur changerait certainement la vie. Elle s’avança sous le ciel et leva le bras pour se protéger des rayons du soleil. Ce geste attira son attention sur son poignet. Un petit cercle noir y était apparu. Curieuse, elle l’observa un instant en fronçant les sourcils avant de se décider à aller voir Charon. Le sans-âme était assis quelque mètre plus loin, discutant avec l’oracle et observant de temps en temps le petit dieu qui semblait dormir debout devant le mur de la maison.

    -Charon ? qu’est-ce que ceci ?

    Elle lui montra le cercle à son poignet. Charon se contenta de lui présenter son poignet droit où trois cercles entrelaçaient apparaissaient. Gardia lui jeta un regard interrogateur auquel Charon se contenta de hausser les épaules. Milen expliqua de sa voix douce :

    -Nous ignorons d’où cela vient. Mais cela ne semble pas gêné Charon.

    Gardia eut une grimace :

    -Est-ce normal aussi qu’un oracle parle si librement ?

    Charon eut un ricanement :

    -Gardia, si tu veux rester, il va falloir comprendre qu’il n’y a rien de normal ici.

    La sans-âme eut un sourire. Un temple où tout le monde dit ce qu’il pense, où les esclaves sont au-delà des maîtres, c’est sûr qu’il lui faudrait un certain temps d’adaptation. Elle s’éloigna dans les marais pour reprendre sa garde.

     

    Milen observa la jeune femme qui s’éloigner avant de revenir vers Charon :

    -Comme je le disais, je n’ai pas eu de nouveau rêve, mais, je ne sais pas si cela vient de mon imagination, je suis sûr que cette nuit nous en saurons plus.

    Le sans-âme prit un caillou et le fit voler droit sur Lutinor pour le réveiller. Le petit dieu poussa un cri de douleur et se frotta l’épaule en regardant autour de lui.

    -Tu ne pourrais pas dormir maintenant ?

    L’oracle lui jeta un regard désapprobateur :

    -Voyons, seule la nuit apporte les rêves importants. Vous voulez me faire croire que vous ne saviez pas cela ?

    Charon sourit :

    -Je voulais voir si vous le saviez. Soit, on attendra cette nuit alors.

    Milen hocha la tête avant de jeter un regard vers Lutinor qui s’était de nouveau concentré sur le mur.

    -Peut-être devriez-vous abandonner cette histoire de rune. Rénovez le temple ne serait pas mal. En plus, ne serait-il pas utile de lui apporter des croyants ? cela le renforcerait.

    Charon prit un air mystérieux :

    -Il n’a pas besoin de croyant.

    Milen était perdu :

    -Tous les dieux ont besoin de croyant. Ne pas en avoir précipité leur disparition.

    Le sans-âme hocha la tête :

    -C’est vrai, mais Lutinor n’a pas disparu.

    Milen fronça les sourcils :

    -Personne ne sais qui il est non ?

    Charon sourit en fixant le petit dieu :

    -Ce n’est pas pareil. Un dieu peut s’affaiblir et disparaitre par manque de croyant, mais il peut aussi simplement s’affaiblir et se contenter d’un petit nombre de croyants.

    Milen acquiesça :

    -Donc, Lutinor est faible mais ne disparait pas.

    -Non.

    La vieille femme le dévisagea avec surprise :

    -Non ?

    Charon reporta son regard sur elle, toujours souriant :

    -Non, Lutinor n’est ni l’un, ni l’autre. Il n’est pas faible. Il a une puissance démesurée et c’est pour cela que je comprends pas qu’il est été oublié.

    Milen se perdit dans ses réflexions avant de dire :

    -Avec un peu de chance, cette nuit nous apportera quelque réponse.

    Charon soupira :

    -Espérons.

    Le soir, Gardia revint alors que la nuit était en train de tomber. Milen lui apporta une assiette en demandant :

    -C’est fort gentil à vous de monter la garde, mais la nuit ? comment faites-vous ?

    La sans-âme fut d’abord réticente à répondre à l’oracle, puis se souvenant de ce que Charon lui avait dit dans la matinée, elle s’efforça à dire :

    -J’ai placé des sorts de détection. Si quelqu’un passe je le sentirais.

    Milen la regarda avec admiration :

    -Vraiment ? vous devez être d’une grande force pour pouvoir maintenir des sorts à cette distance.

    Gardia se sentit rougir :

    -C’est pas vraiment si impressionnant.

    Milen la resservit en soupe :

    -Voilà, une double ration pour vous donner des forces. Ne le dite pas à Lutinor ou il en voudra encore.

    La sans-âme eut un timide sourire en plongeant sa cuillère dans l’assiette. Quand tous furent couché, Milen se laissa aller en attendant les rêves.

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