• Chapitre 14

    -Tu connais la suite.

    Noré s'était assise et, pendant tout ce discours, elle avait jeté des regards à Titian comme pour chercher une confirmation de ce qu'on lui racontait. Durant l'épisode de la fumée, le pirate s'était mis à trembler, les bras croisés sur la poitrine. Elle se demanda combien de cicatrices ses manches longues et son pantalon entrait dans ses bottes pouvaient cacher. La jeune fille ne savait pas quoi dire et le silence s'éternisa. Sa mère lui avait toujours dit que son père avait un travail important et qu'il viendrait les rejoindre. Mais elle avait fini par croire qu'il était mort et que sa mère n'osait pas le lui annoncer. Finalement, il était là, la regardant avec des yeux émerveillés, un sourire béat aux lèvres et elle ne savait pas quoi faire.

    -Arrête de la fixer, tu fais peur.

    -Vraiment ? Désolé.

    Noré fut soulagée de l'intervention de Titian, mais elle n'était pas plus avancée sur ce qu'elle était censée dire. Finalement, comme le silence se prolongeait, Lyan sembla sortir d'un songe et, s'exclama soudain :

    -Oh, oui ! Je vais prévenir la résistance et essayait de voir ce que compte faire l'empereur. Il faut aussi que je trouve un moyen de vous faire revenir chez moi sans attirer l'attention. Toi, tu ne bouges pas.

    Il fit volte face et pointa Titian :

    -Toi non plus d'ailleurs. J'y vais !

    Lyan leur jeta des regards émus, commença à monter les marches, redescendit, enlaça fortement Noré et repartit. Quand la porte fut claquée, Titian prit la parole :

    -Surprenant, hein ?

    -Je ne l'imaginais pas comme ça.

    Elle dévisagea le pirate comme si elle le voyait pour la première fois :

    -Finalement, toi et moi, on est...

    -Et bon anniversaire !

    -Tu savais tout depuis le début.

    Titian bailla et s'étira :

    -On peut dire ça. 

    Noré sentit une pointe de colère lui titiller le cœur en sachant qu'on l'avait volontairement laissé dans l'ignorance. La jeune fille prit sur elle bien que des pensées violentes luttaient dans sa tête.

    -Et sinon... Soria ?

    Elle revint à Titian :

    -Elle va bien. Elle m'a accompagné un moment, puis on a été séparé. Elle est chez une femme que l'on a rencontré.

    Le visage de Titian se décomposa et il se mit à hurler :

    -Quoi ? Tu l'as laissé toute seule chez une inconnue ! Mais t'es pas bien ! Elle va faire comment pour se défendre sans ses bracelets ! Et dans son état ! T'es complètement inconsciente !

    Ce fut la goutte d'eau et Noré se mit à hurler, enragée :

    -Ta gueule ! T'étais pas là ! Je te signale qu'elle sait ce qu'est un poignard ! De quel droit tu me parles comme ça ?! Après tout ce que j'ai traversé ! J'ai été attaqué, blessé, pourchassé, mise en esclavage, jeté dans le vide, torturé, on a même failli me bouffer ! Alors tes commentaires, tu te les gardes ! En plus, j'ai failli ne jamais arrivé, j'avais abandonné et si je n'avais pas changé d'avis, mais, mon vieux, vous auriez été dans la merde ! Seulement voilà, moi, bonne poire je reprend la route ! Je m'occupe de ta femme, d'un gosse qui sort de je ne sais pas où ! Et je te parle pas de mon saut dans le futur plus que décourageant. Sans compter que je suis censée crever à moins de trouver un moyen miraculeux d'éviter la guerre ! Et au cas où tu ne l'aurais pas remarqué, je suis en train de devenir complètement cinglée ! Alors, Titian, je t'adore, te voir en vie me comble de bonheur, mais ferme ta putain de gueule !

    Sa voix était allée crescendo et, maintenant, elle avait mal à la gorge. Sans s'émouvoir le moins du monde, il se gratta la tête :

    -Pauvre petit chou, ça va mieux ?

    Noré soupira :

    -J'ai une vie de merde.

    -Je trouve aussi. Je suis content d'être moi.

    Elle se laissa retomber sur sa chaise et ils restèrent silencieux jusqu'au retour de leur père. Son essoufflement montrait qu'il avait du courir :

    -C'est fait. Maintenant, il faut te sortir de la ville et te trouver une cachette sûr.

    -Je croyais que c'était là, le lieu sûr.

    -Changement de plan. Les gardes sont toujours à ta recherche.

    Le pirate prit part à la conversation :

    -Je pensais qu'ils la croiraient noyée dans l'étang.

    -Visiblement, ce n'est pas le cas. Ils risquent de fouiller partout, on ne peut pas la garder ici.

    -Vous n'avez pas de plan de secours ?

    Titian et Lyan la regardèrent, apparemment gênés. Puis, leur père proposa :

    -On a qu'à rester ici pour y réfléchir.

    Ils s'assirent chacun dans un coin, cherchant un moyen de la faire sortir quant une pensée frappa soudain la jeune fille :

    -Soria voudra venir me chercher.

    Titian se redressa :

    -Comment ?

    -La pierre des Auriens. Si les jumeaux ont réussi leur coup, elle doit l'avoir récupéré.

    -Si elle atterrit dans le siège , ça va se remarquer.

    -La pierre ne peut pas nous faire apparaître dans l'enceinte du siège.

    -Voilà, qui est pratique.

    Lyan intervint :

    -Pardon, qui est Soria ?

    Noré lança un regard étonné vers le pirate :

    -Tu ne lui as rien dit ?

    Le garçon s'étira en rechignant :

    -Mais il va encore pleurer et me faire des câlins, c'est hors de question.

    Lyan répéta :

    -Qui est Soria ?

    -Une femme qui nous accompagne. 

    -Tu ne m'en a jamais parlé.

    -Bah, tiens.

    Noré se leva :

    -Si Soria vient, elle atterrira aux alentours de l'enceinte. Vous devriez allé la chercher, on verra après pour que je puisse sortir. 

    Lyan secoua la tête négativement :

    -Je préfère que Titian reste caché, j'irais seul.

    Le pirate en profita pour proposer innocemment :

    -Une catapulte.

    -Sois gentil avec ta sœur.

    Il sourit à Noré avec fierté :

    -J'ai toujours voulu dire ça.

    Elle lui offrit un sourire amusé et Lyan reprit :

    -Plus sérieusement, je pense qu'un sac serait mieux.

    -Un sac ?

    -Oui, on utilise des grands sacs pour les livraisons. Je pourrais en prendre un.

    Titian eut un sourire mauvais :

    -C'est moi qui le ferme.

    Noré grimaça :

    -Je préfère la catapulte.

    Lyan la regarda avec tendresse :

    -Ça va aller. Je vais voir si ton amie est là et je vais chercher un sac. Elle est comment votre amie ?

    Titian bailla :

    -C'est une Saldrian, tu ne peux pas la manquer. Cheveux longs noirs, des yeux lapis-lazuli, grande, fine, gracieuse... 

    Son père le coupa, un sourire en coin :

    -Une Saldrian, quoi.

    -Exactement.

    -Je vais jeter un coup d'œil, alors. Vous ne bougez pas d'ici.

    Il partit, grimpant les marches quatre par quatre et Noré se demanda s'il n'était pas épuisé à courir partout comme il le faisait. Titian retourna s'asseoir et engagea la conversation :

    -Alors, tu es venu ici toute seule ?

    -Non, Xilanos m'a accompagné.

    -Ah.

    -Les Fileurs l'ont pris.

    -Ouais.

    -Mais je l'ai délivré.

    -Ah.

    Avec une angoisse au cœur, Noré se demanda comment l'Aurien pouvait aller. Téline saurait-elle seulement le soigner ?

    -Que comptes-tu faire quand tu seras sorti ?

    Elle haussa les épaules :

    -J'avais espéré qu'une fois au siège tout s'arrangerait. Je pensais que Lyan s'occuperait de tout.

    -Il fera tout ce qu'il pourra, tu peux en être sûr.

    Noré n'en doutait pas, mais il ne semblait pas plus avancé qu'elle. Il fallait arrêter de se voiler la face, Lyan ne savait pas non plus quoi faire. Elle sursauta en entendant la porte se rouvrir et son père dévala les escaliers et dit d'une voix essoufflée :

    -Bon, je ne l'ai pas trouvé...

    Titian le coupa avec une mine soupçonneuse :

    -Tu as fais tous les alentours du siège ?

    -Non, juste devant la porte. Je me suis dit qu'elle s'en approcherait. Au cas où tu ne le saurais pas je n'ai pas tellement le temps de fouiller toute la ville.

    Il se tourna vers sa fille :

    -Je retournerais voir plus tard. En attendant, voici le sac.

    Il exhiba un large sac de toile et le posa au sol :

    -Tu devrais essayer de rentrer dedans pour voir si tu y tiens. 

    Noré obéit avec réticence. Lorsque Titian ferma le sac au-dessus de sa tête, elle ne pouvait plus bouger et avait du mal à respirer. La voix de Lyan lui vint à travers le tissu :

    -Alors ?

    -Rien d'insupportable.

    -Très bien.

    On la libéra et elle sortit avec soulagement. Le pirate croisa les bras :

    -Bon, elle entre, mais comment on sort le sac, maintenant ?

    -C'est le jour de livraison. Les marchands entrent dans l'enceinte pour livrer de la nourriture qu'on leur échange contre d'autre marchandise.

    Noré fut étonnée :

    -Vous ne les payez pas ?

    -Avant oui et puis Daron a lancé ce système. On pense qu'il s'agit d'une tradition oubliée depuis des siècles et que l'empereur a eu à cœur de faire revivre.

    -Il est cinglé.

    -On en a jamais douté. Bon j'y retourne.

    -Encore ?

    -Eh bien, oui. On ne sait pas quand votre amie pense arriver. Une chose est sûr, c'est qu'on ne la laissera pas entrer.

    Titian rappela :

    -C'est une Saldrian, à mon avis, elle essaiera de ne pas se faire trop voir. Elle doit se douter qu'il y a des Fileurs au siège.

    -Alors, j'irais jusqu'à fouiller les petites rues et les coins sombres.

    Il ressortit avec plus de lenteur cette fois, ces allé-retours commençaient à l'épuiser. A nouveau seuls, Noré et Titian restèrent un instant silencieux quant il sortit. Le pirate soupira et s'affala dans un siège caché par une des étagères, tandis que Noré se dégourdissait les jambes en farfouillant dans la pièce. Il n'y avait pas de doute, celle-ci n'avait pas été utilisé depuis longtemps, vu le nuage de poussière qui s'envola quand elle s'empara d'un livre. Titian bailla, s'étira et demanda :

    -Dis donc, il t'a dit quoi l'empereur, lors de votre entretien ?

    -Il m'a gentiment expliqué en quoi consistait la cérémonie. Que je devrais me tuer après avoir tué tous ceux à qui je tenais.

    -Comme il est attentionné.

    -Je trouve aussi.

    Il se redressa soudain, sourcils froncés :

    -Attends, ça veut dire qu'il a le bracelet ?

    -Oui, pourquoi ?

    -Tu crois qu'il peut toujours voir les carrés ? Même si tu n'es pas dans le coin ?

    -Je ne sais pas, mais je n'aime pas trop ce que tu veux sous-entendre.

    -S'il les voit toujours, alors il sait qui chercher. Et s'il le sait, alors ils sont tous en danger.

    Elle déglutit avec difficulté :

    -Toi aussi.

    -Pourquoi ? Tu me croyais mort, non ?

    -Oui, mais d'après ce que Lyan a raconté de quand tu étais petit, quand Kalia vous a vu pour la première fois, vous êtes apparu dans les carrés. S'ils se modifient alors...

    -Alors, ce carré a pu se modifier pour me montrer bien vivant. Je te hais.

    -Je sais.

    Un silence pesant s'imposa. Noré commença à chercher un moyen de protéger tous ces amis, mais c'était une tâche colossale et qui lui semblait irréalisable. Il était impossible d'y arriver avant les hommes de l'empereur, surtout si celui-ci était toujours aidé du pirate aux cheveux océans. Titian s'était levé et faisait les cents pas. Brusquement, il balaya tout ce qui se trouvait sur le bureau d'un geste du bras, en criant :

    -On pourrait pas avoir un peu de chance pour une fois ?!

    Noré regarda tout le bazar tomber sur le sol dans un grand fracas, en espérant bêtement qu'il n'avait rien cassé. Les minutes d'une angoisse nouvelle s'égrainèrent lentement, quand Lyan jaillit de nouveau dans la pièce :

    -Je l'ai trouvé ! Ça y est !

    Titian et Noré s'entre-regardèrent avant de poser la seule question qui leur traversé l'esprit :

    -Comment ?

    -Elle était en train d'engueuler les gardes qui ne voulaient pas la laisser entrer.

    -Engueuler ? Avec sa voix ?

    Titian leva les yeux au ciel :

    -Avec quoi d'autre crétine.

    Noré ne répliqua pas. Il était inutile de l'inquiété encore plus en lui révélant que Soria n'avait pas ouvert la bouche depuis l'épisode de la barque. Lyan poursuivit :

    -Je lui ai dit d'attendre près d'une boutique d'herbes pas loin. On a plus qu'à charger Noré dans la charrette d'un des marchands.

    Voilà qui était trop beau pour être vrai et c'est Titian qui ajouta :

    -Les Fileurs ? Ils ne vont pas être lâchés sur elle ?

    Lyan fit la grimace :

    -Il vaudrait mieux ne pas perdre de temps à se poser la question.

    Noré grimpa dans le sac. Titian lui tendit un poignard qu'il cachait dans sa botte pour qu'elle puisse en sortir et le ferma avant que Lyan le mette sur son épaule. Elle étouffait presque dans ce sac en toile. Pour rien arranger l'épaule enfoncée dans son estomac, lui coupait le souffle. Mais elle resta silencieuse, sans bouger.

    Elle n'avait aucun moyen de savoir le chemin emprunté, devina qu'ils étaient dehors lorsque le soleil perça le sac et, là encore, Lyan marcha un moment. L'épaule dans son ventre commençait à être vraiment douloureux et la jeune fille serra les dents en grimaçant de douleur. Enfin, il la posa au sol. Elle entendait tout autour le brouhaha de discussion. Des marchands qui râlaient sur le système d'échange, le son de roues de bois sur les graviers et le trépignement de chevaux. Pendant un moment, on la laissa là, sous le soleil et elle espérait que l'attente ne durerait pas trop longtemps, car dans ce sac, la chaleur était insupportable. Puis, on la porta de nouveau et on la posa sur une surface dur qui devait être du bois. Elle fit de son mieux pour rester immobile et respirer doucement, de peur que son souffle ne soulève la toile. Elle entendit Lyan dire avec un cliquetis de pièces qui s'entrechoquent :

    -On est bien d'accord ? Vous sortez de l'enceinte, vous éloignez un peu et abandonnez le sac près de la boutique d'herbe dans la troisième ruelle.

    La voix du marchand lui répliqua :

    -Je sais où elle est, il n'y en a pas cinquante.

    D'autres cliquetis :

    -Ceci, pour que vous ne regardiez pas dedans.

    Le marchand ne pipa mot. Noré entendit le bois grincer tandis qu'il remontait sur la charrette. Puis, le véhicule démarra. Elle écoutait avec angoisse tous les sons qui l'entourait. Tout semblait bien se dérouler. Peu à peu, elle sentit les secousses de la charrette s'espacer et entendit les pas des chevaux ralentir, sans doute étaient-ils en train de passer la porte de l'enceinte. Puis, ils reprirent une allure normale. Ils ne firent que quelques mètres avant de s'arrêter. Le marchand empoigna le sac, le souleva et le jeta. Noré ouvrit la bouche dans un cri muet lorsqu'elle rencontra les pavés. Elle resta sans bouger jusqu'à ce que le son des roues de la charrette et des sabots des chevaux soient devenus imperceptibles.

    La jeune fille perça le sac avec le poignard de Titian et jeta un coup d'œil par le trou. L'homme semblait l'avoir jeté dans une impasse sur un tas de déchet. Quant elle fut assurée que la voie était libre, Noré fendit le sac sur la longueur et glissa à l'extérieur en fronçant le nez. Une fois extraite, elle s'approcha avec précaution du bout de l'allée, respira à plein poumon l'air frais qui venait de la rue, avant de faire demi-tour. Elle trouva l'enseigne montrant une plante dans un pot et chercha Soria du regard. Comme elle ne la vit pas, Noré s'assit là où elle se trouvait, le dos appuyé au mur, jetant de temps en temps des coups d'œil vers la rue et le fond de l'impasse où elle avait été déposé. Elle commençait à s'inquiéter lorsque des pas légers lui parvinrent. D'une ruelle adjacente, si étroite qu'elle ne l'avait pas vu, Soria apparut. Elle vint serrer Noré dans ses bras et celle-ci lui dit :

    -Je commençais à m'inquiéter.

    -C'était pas facile à trouver en restant à couvert.

    Noré la dévisagea en souriant :

    -Alors, c'est vrai ? Tu t'es remise à parler ?

    Soria la fixa avec mauvaise humeur :

    -Disons que la colère l'a emporté sur tout le reste. Où tu as bien pu dégoter deux abrutis pareil ?

    -Les jumeaux ? Qu'est-ce qu'ils ont fait ?

    -Je te laisse imaginer.

    Noré rit en se demandant ce qu'ils avaient pu faire en si peu de temps, puis demanda :

    -Comment va Xilanos ?

    Le visage de son amie s'assombrit:

    -Pas très bien, j'en ai peur. Téline s'occupe de lui.

    -D'accord. On devrait y aller. Tu as le collier ?

    -Bien sûr, mais j'ai quelques questions à te poser. Notamment concernant l'homme qui m'a parlé.

    -On peut voir ça chez Téline. Je crois que l'on n'a pas intérêt à traîner dans le coin.

    Soria fronça le nez :

    -Tu as raison.

    -Tu sais où trouver de l'eau ?

    -J'ai repéré des flaques peu ragoûtantes en arrivant, il me semble que s'en était.

    Noré la suivit donc à travers la ruelle étroite, après quoi elles traversèrent une rue plus large avant de retourner dans une autre ruelle. Là, Soria stoppa net et la jeune fille regarda la petite étendue d'eau qu'elle lui montrait du doigt. Noré comprit les doutes de la Saldrian. Le liquide était noirâtre et puait à plein nez, mais elle refusa de perdre du temps à se poser des questions sur son origine. Elle y jeta la pierre en demandant à retrouver l'Aurien.

    Elles atterrirent au beau milieu de la maison de Téline. Celle-ci sursauta répandant au sol le contenu d'une bassine qu'elle avait en main. Posant une main sur sa large poitrine, elle s'exclama :

    -Vous m'avez fait peur.

    Noré bredouilla des excuses en cherchant Xilanos. Posant une main sur son épaule, Soria lui montra une porte :

    -Il est dans cette chambre.

    La jeune fille fixa la porte comme si elle s'attendait à ce qu'elle prenne vie. Elle avait peur de ce qu'elle trouverait derrière. Malgré tout, Noré s'avança et ouvrit la porte. L'Aurien avait été allongé sur le ventre, des bandages recouvraient ses blessures. Elle alla s'asseoir sur le bord du lit et passa doucement la main dans les cheveux argents. Il semblait dormir paisiblement.

    -Tu ne fais pas de bruit.

    Elle tourna la tête vers la porte. Bébé se tenait dans l'embrasure, mais Soria lui tenait le bras. Comme il promettait d'être sage, elle le laissa entrer. Il s'approcha à petits pas pour veiller à ne pas faire de bruit comme promis et grimpa sur les genoux de Noré. Il ne dit rien et elle contemplait Xilanos paisiblement. Peut-être qu'il se réveillerait bientôt. Un petit coup frappait à la porte la tira de sa rêverie, Téline demanda doucement :

    -Tu as faim ?

    La jeune fille hocha la tête et se leva, l'enfant accrochait à son cou. Ils sortirent et Téline referma la porte doucement. Sur une table, des assiettes et des cuillères étaient empilées, une odeur appétissante sortait d'un chaudron qui pendait dans la cheminée.

    -Servez-vous et installez-vous où vous pourrez, je crains qu'il n'y ait pas assez de siège pour tout le monde.

    Des coups furent frappés à la porte et les voix des jumeaux leur parvinrent à travers le bois :

    -On pourra manger aussi ?

    Téline jeta un regard interrogateur à Soria et celle-ci croisa les bras d'un geste déterminé. Noré demanda :

    -Qu'est-ce qu'ils font dehors ?

    -Ils sont punis.

    Noré retint un rire pour demander :

    -Et ils peuvent manger ?

    Soria haussa les épaules :

    -Faites comme vous voulez, du moment qu'ils ne m'approchent pas.

    Noré se tourna vers Téline qui tentait de cacher un sourire derrière sa main et la jeune fille alla ouvrir la porte. Les jumeaux sursautèrent en découvrant Noré :

    -Voilà qui fait un choc.

    -Vous pouvez manger.

    Soria surgit derrière elle :

    -Un mot, un geste et je vous refout dehors.

    Les deux garçons hochèrent la tête, l'air penaud. Chacun prit une assiette et se servit en silence. Noré décida d'aller manger dehors. Le soleil n'était pas encore couché et la chaleur étouffante de la journée s'effaçait peu à peu. Elle mangea pensivement, repensant à ce qu'avait dit Titian. Comment protéger ceux qu'elle connaissait ? Soria vint s'asseoir à côté d'elle :

    -Alors ? Tu me racontes ?

    -Titian est vivant.

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