• XIII - Hiloy

    Hiloy Plilaz

    Rang : Or

    Héritier.ère de la grande famille Plilaz

    Héritier.ère de la charge de gardien

     

    De voir les derniers membres de leur classe leur faire des signes, Hiloy se sentit soulagé.e. Non pas parce qu'ils étaient sains et saufs, bien qu'iel fut content.e de les voir en forme, mais parce qu'iel fatiguait. Lae Cinquième en avait assez de ce dédale et iel en avait assez de courir partout. L'adolescent.e avait été tenté.e de proposer de séparer le groupe en deux. Un pour chercher les autres, un pour chercher la sortie. Iel n'arrivait plus à penser qu'à sortir d'ici. Bien sûr, Hiloy n'avait jamais exposé cette idée à haute voix car iel savait que cela aurait été stupide. Entre autre, il n'aurait eu aucun moyen de se retrouver par la suite. Lae Cinquième avait du prendre son mal en patience et maintenant que la classe allait être complète, iel trépignait de pouvoir, enfin, chercher la sortie.

    Comme pour les autres, il fallut jongler entre différents niveaux, différentes passerelles pour se rejoindre. Quand ils furent tous réunis, l'enthousiasme l'emporta et les paroles fusèrent en tous sens. Hiloy s'écarta un peu, ne souhaitant pas être mêlé.e à des effusions où iel n'avait pas sa place. Falibi ne tarda pas à la rejoindre :

    -Eh bien, t'en fais une tête.

    Hiloy lui sourit en soupirant :

    -J'ai juste hâte que l'on sorte d'ici.

    Son amie observa, radieuse, les retrouvailles qui se déroulaient près d'eux :

    -On va s'y mettre maintenant, t'inquiètes.

    Matior s'exclama soudain :

    -Ah, attendez, Lyert t'as vu pour Citseko ?

    Tout le monde s'arrêta, perplexe quand au sens de ces paroles. Même son ami lui jeta un regard qui demandait des explications.

    -Mais si, la manivelle.

    Un éclair de compréhension frappa Lyert :

    -Ah ! Mais oui ! Citseko...

    Celui-ci ayant également saisit de quoi il s'agissait, ouvrit son sac pour en sortir l'objet. Hiloy s'était approché.e comme tous les autres pour savoir ce qu'il se passait. Matior expliqua :

    -On a trouvé ça dans un arbre.

    Qegh fronça les sourcils :

    -Ça vous prend souvent de grimper dans les arbres pour chercher des manivelles ?

    Lyert répondit d'un ton moqueur :

    -Mais non, idiote. Un point noir est apparu sur la carte pour nous indiquer où il était.

    Ora prit la parole en posant son regard sur les uns et les autres :

    -Et vous, vous n'avez pas trouvé quelque chose ?

    Les membres des deux autres groupes secouèrent la tête. Indilk prit la manivelle des mains de Citseko et la fit tourner entre ses doigts, tandis que Meb demandait :

    -Ça sert à quoi à votre avis ?

    Laxo proposa :

    -Peut-être à ouvrir la porte pour sortir d'ici ?

    Lae Cinquième tenta :

    -On devrait d'abord trouver la porte, non ?

    Xutik s'empressa de dire :

    -Hiloy a raison. On a assez traîné.

    Neghttris glissa à Elférad :

    -A quel moment on a traîné ?

    -Me regarde pas, il était avec vous. Nous on a fait ce qu'on a pu, hein ?

    Matior et Ora hochèrent la tête, alors que Meb demandait à Citseko :

    -Vous l'avez vraiment trouvé dans un arbre ?

    Son héritier d'argent acquiesça.

    -T'étais avec qui ?

    Avant que Citseko ne puisse répondre, Tahiya lança :

    -Par où on va ?

    Hiloy lui était reconnaissant.e d'être toujours prête à mettre le groupe en mouvement. Et de fait, une discussion s'ensuivit pour savoir dans quelle direction se rendre. Bélera murmura quelque chose à l'oreille de Laxo qui répéta à haute voix :

    -Quelqu'un se souvient de par où il vient déjà ?

    Hiloy regarda autour d'ellui incapable de se repérer. Iel ne fut pas lae seul.e, Indilk jeta à Laxo un regard blasé en lâchant :

    -T'es sérieuse ?

    Laxo pointa Bêlera en disant d'une petite voix :

    -C'est pas moi, c'est elle.

    Son amie lui envoya un léger coup de coude. Lyert poussa un cri de douleur qui attira l'attention de tous et se voyant observé alors qu'il se frottait le bras, il geignit :

    -Elle m'a pincé.

    Qegh se contenta de commenter :

    -Il m'a traité d'idiote.

    Le groupe se détourna d'eux pour revenir à la question essentielle. Elférad résuma :

    -De là où on est, soit on monte, soit on descend.

    Hiloy retint un soupir. Lançait comme ça, la discussion allait durer des heures et iel avait besoin de bouger. Ce fut Indilk qui lae sauva en disant :

    -On a qu'à avancer et voir dans quelle direction va le prochain escalier. S'il monte, on monte, s'il descend, on descend.

    Lae Cinquième s'empressa d'approuver en levant la main :

    -Je vote pour cette idée.

    Tous les regards convergèrent vers ellui. Oups, j'avais oublié. Maintenant qu'iel avait donné son avis, ils se sentiraient tous obligés de suivre. De fait, Tahiya lui demanda :

    -On va voir de quel côté alors ?

    Hiloy baissa son bras dans une direction au hasard. Neghttris murmura :

    -C'est parti.

    Tandis qu'ils se mettaient en mouvement lentement. L’adolescent.e se mordit la joue en se répétant qu'iel devait faire attention à ce qu'iel faisait. Si iele donnait l'impression d'abuser de sa position, cela ne l'aiderait sûrement pas à se faire bien voir de la classe. Falibi se retourna en voyant qu'iel traînait :

    -Hiloy ? Qu'est-ce que tu fais ? Dépêche-toi.

    Lae Cinquième rattrapa le groupe. Venant de devant, la voix de Tahiya leur annonça :

    -On monte.

    Indilk ajouta :

    -Faites gaffe à ce qui vous entoure, maintenant. On ne sait pas à quoi ressemble cette porte de sortie, ni même s'il s'agit d'une porte.

    Meb demanda :

    -Et si on monte tout en haut et qu'il n'y a rien ?

    Indilk répliqua :

    -On descendra tout en bas.

    Ils commencèrent leur ascension, continuant de tricher en cas de besoin pour s'éviter des détours. Vish finit par proposer :

    -Vous ne voulez pas que l'on se repose un peu ?

    Si on se repose toutes les cinq minutes, on n’y arrivera jamais. Hiloy serra les dents en espérant que personne ne partagerait son avis. Iel vit Citseko ralentir, plus inquiet du fait que personne ne lui répondait que par l'envie de s'arrêter :

    -Tu veux que je porte ton sac ?

    Vish jeta à peine un regard au garçon avant de dire d'une voix plus forte :

    -Personne n'a envie de faire une pause ? J'en fais une moi.

    Et elle s'arrêta. Hiloy s'arrêta à son tour pour demander le plus sérieusement du monde :

    -Citseko porte ton sac et je te porte sur mon dos, si tu veux.

    Vish rit :

    -Non, ça va aller. Je vais rester là quelques minutes et je vous rejoins.

    Quelques marches plus haut, Theaon lança à ceux qui continuaient :

    -Attendez ! Ils font une pause.

    Hiloy s'empressa de dire :

    -Non, non, Vish se repose quelques minutes et on vous rejoint.

    Iel vit Gec-Nüj et Xutik s’asseoir sur les marches, puis se furent Laxo et Bélera, puis au fur et à mesure, tout le groupe se trouva assis. Hiloy sentit son énervement s'évaporer aussi vite qu'il était venu. Ils doivent être vraiment fatigués. Bon, quitte à être bloqués là. Iel s'assit comme les autres et fouilla son sac à la recherche d'une bouteille d'eau. Alors que tous en profitaient pour grignoter et boire, iel nota que Citseko, une marche plus bas, ne bougeait pas.

    -T'as pas soif ?

    L'adolescent secoua la tête, mais iel ne put s'empêcher de noter qu'il glissait des regards fréquent à sa bouteille d'eau. L’adolescent.e lui tendit :

    -Si t'as plus d'eau, tu peux prendre la mienne.

    Citseko hésita avant de dire :

    -Je m'inquiète un peu de notre réserve d'eau.

    Ah, pas bête. Iel leva la tête pour tenter d'apercevoir le sommet, mais n'y parvint pas. Lae Cinquième revint au garçon :

    -Tu devrais boire quand même. On se débrouillera. Je ne pense pas que tu sois le seul qui pense à ça.

    Citseko fut un peu rassuré et accepta la bouteille qu'on lui tendait. Hiloy proposa à Vish :

    -Tu veux de l'eau ?

    La jeune fille considéra le goulot sans chercher à cacher son dégoût :

    -Non, merci, j'ai la mienne.

    Lae Cinquième, amusé.e de cette réaction, demanda à l'esclave qui se tenait encore debout :

    -Ze, tu en veux ?

    Vish éclata d'un rire si fort qu'Hiloy se sentit rougir. Cependant, Citseko tendit la bouteille à Ze. Comme il était évident qu'elle ne pouvait pas la proposer à son esclave, Vish repoussa son bras avec humeur :

    -Je t'ai dis que je n'en voulais pas.

    Hiloy se crispa devant le ton employé, mais comme l’héritier d’argent ne semblait pas s'en formaliser, iel ne dit rien. A cet instant, Indilk lança :

    -On repart.

    Le groupe se leva dans un concert de grognements et d’étirements. Hiloy se surprit à bâiller. Mince, on aurait pas dû s'arrêter. Ils reprirent leur ascension, mais lae Cinquième eut le sentiment qu'ils avançaient avec plus de lenteur. C'est toi qui est crevée, c'est tout. Essaie de pas te faire distancer. Pourtant, iel aurait bien aimé.e fermer les yeux deux minutes. Et toi qui te plaignait que les autres voulaient faire une pause. Lae Cinquième ricana, se moquant d'ellui-même. A un moment, Laxo se tourna vers ellui pour demander :

    -Dis, c'est vrai que Tahiya a passé une annonce pour se trouver un fiancé ?

    Hiloy réfléchit. Ça me dit quelque chose cette histoire. Bélera intervint doucement :

    -Mais non, c'est Falibi...

    Laxo ne la laissa pas finir :

    -Ah oui, je suis bête.

    Près d'Hiloy, Falibi se redressa :

    -Mmmh ?

    Laxo descendit se mettre près d'elle pour lui reposer la question. Hiloy en profita pour essayer de deviner combien de distance il leur restait à parcourir pour atteindre le plafond. Ah, mais on est censé chercher des portes aussi. Iel s'inquiéta que le groupe, perdu dans diverses discussions, ait oublié cet objectif, mais en regardant partout, l’adolescent.e ne vit rien d'autre que des passerelles et des escaliers. Iel eut le sentiment qu'ils ne sortiraient jamais d'ici. Devant ellui, Hiloy entendit Ora demander à Theaon :

    -C'est plus facile, non ? Ça fait un moment qu'on a pas eu à faire d'escalade.

    Hiloy tilta. C'est vrai ça. A ce moment, le groupe s'arrêta. Xutik demanda à ceux qui se trouvaient devant :

    -Il se passe quoi ?

    Indilk lui répondit d'une voix forte pour que tous puissent entendre :

    -Il y a un escalier.

    L'héritier d'or répliqua :

    -C'est pas le premier, c'est quoi ton problème ?

    Lae Cinquième se mit sur la pointe des pieds pour tenter d'apercevoir ce qu'il y avait. Iel nota Falibi à sa droite qui lae dépassait d'une bonne tête :

    -Tu vois quelque chose ?

    Son amie allait répondre quand Tahiya lança :

    -Il n'y a que des escaliers.

    Hiloy interrogea Falibi du regard :

    -Il y a juste un escalier. Il n'est pas grand, je le vois à peine.

    Vish s'incrusta dans la discussion :

    -Et alors ? On le monte et c'est tout.

    Falibi pinça les lèvres :

    -Il semble mener nulle part cet escalier.

    Devant, la discussion continuait et quand son amie se tut, Hiloy se concentra pour essayer d'entendre ce qui se disait. Matior lança :

    -Ils ont peut-être eu la flemme de continuer.

    Gec-Nüj leva les yeux au ciel en s'agaçant :

    -Bon, on fait quoi maintenant ?

    Vish éleva la voix :

    -Vous voulez que l'on envoie Ça pour voir ?

    Voir quoi s'il n'y a plus rien ? Citseko dut se pencher sur le côté pour apercevoir Meb quelques marches plus haut :

    -Vous croyez qu'il y a quelque chose de caché ?

    L'adolescent répondit :

    -On pense. Pourquoi s'arrêter si brusquement, sinon ?

    Laxo proposa :

    -Peut-être pour nous dire que c'est en bas.

    Hiloy murmura :

    -Il vaut mieux être sûr de toute façon.

    Il était évident que ceux qui se tenaient devant ne les entendaient pas, car Indilk mit un pied sur la première marche sans prêter attention à la proposition de Vish. Tout le monde retint son souffle en le voyant faire. Il arrivait à la quatrième marche, la dernière qui fut visible, quand un escalier gigantesque apparut. Hiloy se tordit le cou en essayant d'apercevoir le bout, mais c'était peine perdue. L'escalier montait apparemment jusqu'au sommet.

    -Ça, ça ressemble à une sortie.

    Personne ne trouva à redire à la supposition de Neghttris. L'escalier en colimaçon était assez large pour qu'ils puissent marcher à trois de front et ils commencèrent l'ascension avec plus d'entrain qu'ils n'en avaient eu jusqu'à présent. Cependant, lorsque Vish et Ze, qui marchaient en queue du groupe, posèrent le pied sur la première marche une énorme explosion fit trembler toute la structure. Hiloy s'accrocha à la rambarde avant de chuter. Iel levait le bras pour soutenir Falibi juste devant ellui, quand, en lui tombant dessus, Bélera l'avait faite basculer en arrière. Falibi réussit à retenir la jeune fille qui avait manqué la rambarde de peu et n'avait pu se rattraper.

    -Ça va ?

    Son amie et Bélera hochèrent la tête. Le temps sembla se figer un instant. Personne n'osa respirer ou prononcer un son se demandant ce qu'il venait de se passer. Ils attendirent une minute, avant que Qegh ne tente :

    -C'était quoi ça ?

    Lyert allait répondre quand une nouvelle secousse les obligea à s'accrocher. Matior fut celui qui reprit la parole :

    -On est d'accord que c'est pas normal.

    Xutik s'emporta :

    -Qu'est-ce que vous attendez pour monter ?

    Tahiya répondit :

    -Et si on bouge et que ça aggrave les choses ? Quelqu'un sait ce qui a déclenché ça ?

    Hiloy regarda vers le bas. Ça paraîtrait logique.

    -Je crois que c'est quand Vish et Ze sont montées. Tout le groupe est sur l'escalier maintenant !

    Xutik s'agaça encore :

    -Vous avez entendu ? Grouillez et montez.

    Elférad lui lança :

    -Reste calme Xutik. On n’est pas vraiment dans une position qui nous permet de réagir précipitamment.

    -Ça tombe, ça tombe, ça tombe.

    Tahiya observa son cousin qui se rongeait un ongle :

    -Quoi ? Qu'est-ce qui tombe ?

    Il pointa un doigt vers le vide et la jeune fille se pencha. D'autres l'imitèrent, dont Hiloy qui les avait vu faire. Iel plissa les yeux en essayant de distinguer quelque chose :

    -Falibi, tu vois quelque chose ?

    -Non, il fait trop noir en bas.

    Ce fut au tour d'Ora d'intervenir :

    -Pourquoi il dit ça ? Je ne vois rien.

    Tahiya réfléchit rapidement avant de déclarer :

    -On monte.

    Indilk la retint :

    -Tu ne crois que l'on devrait réfléchir encore, non ?

    L'adolescente se crispa :

    -Non, on n’a plus le temps. S'il dit que ça tombe, ça tombe.

    Sans rien ajouter, l’héritière d’or commença à monter les escaliers quatre à quatre, Nsoah sur ses talons. Gec-Nüj se tourna vers les autres :

    -Quelqu'un a compris ? C'est quoi qui tombe ?

    Un effondrement métallique résonna dans tout l'espace et une nouvelle secousse manqua les faire tomber. Hiloy chercha son souffle quand iel réalisa ce qu'il se passait. Les passerelles, les passerelles tombent. Neghttris lança soudain :

    -La structure s'effondre ! Montez, vite, vite !

    Hiloy attendit avec impatience que ceux devant ellui se mettent en mouvement pour pouvoir monter.

    -Ze !

    Le cri de Vish la fit se retourner. L'esclave bondit soudain, donnant un violent coup de coude dans le dos de Citseko qui lui bloquait le passage. Le garçon s'effondra pendant que Vish et Ze en profitait pour passer devant. Hiloy attrapa l'uniforme de Falibi à temps pour l'écarter du passage de l'esclave qui semblait prête à tout pour que Vish monte plus rapidement. Lae Cinquième retint un juron, se tournant vers Citseko pour l'aider à se relever, mais le garçon était déjà debout :

    -M'attendez pas, montez, montez.

    Ils reprirent leur montée. Hiloy ne tarda pas à sentir les muscles de ses jambes la brûler. Iel n'avait plus de souffle et résistait à l'envie de s'arrêter, juste cinq minutes pour récupérer. L’adolescent.e jetait des coups d’œil régulier vers le bas pour voir si les escaliers commençaient à disparaître, mais ce n'était toujours pas le cas. Je pourrais m'arrêter, juste un peu. En levant, la tête, iel vit Bélera et Laxo qui n’avançaient plus. Falibi les passa, mais Hiloy s'arrêta :

    -Qu'est-ce qu'il y a ?

    Laxo pointa son héritière d’argent du doigt :

    -Il faut qu'elle récupère.

    Ouf. Hiloy préférait ne pas être seul.e à rester en arrière pour reprendre son souffle, Laxo lui dit :

    -Tu peux y aller, t'es pas obligée de nous attendre.

    Lae Cinquième secoua la main en respirant profondément et s'asseyant sur une marche :

    -Non, ça va.

    La menace lui paraissait encore lointaine, si bien qu'iel se demandait s'ils n'avaient pas paniqué trop tôt. Hiloy aperçut Falibi qui allait redescendre à sa recherche, mais lui cria :

    -Continue, Falibi ! Je dois respirer un peu !

    -T'es sûre ?

    Lae Cinquième confirma et vit son amie poursuivre sa montée. Ça va aller, on a le temps, en fait. Une nouvelle secousse fit rater un battement à son cœur. Peut-être pas. Iel échangea un regard avec Laxo, alors que Bélera sautait sur ses pieds :

    -Ça va mieux, moi.

    Hiloy l'imita :

    -Oui, moi aussi.

    Elles se remirent à grimper, mais avec moins de précipitation. Hiloy surveilla sa respiration et fit son possible pour ignorer la douleur diffuse dans ses jambes. Le groupe, de manière générale, avait ralenti. Certains s'arrêtaient également pour récupérer. Lae Cinquième finit par se mettre à marcher. Il vaut mieux que je conserve mes forces pour quand il faudra vraiment courir. De fait, la vague de panique s'était calmée. Iel rattrapa Neghttris qui se tenait le côté :

    -T'as mal ?

    Le garçon eut un petit rire mauvais :

    -C'est Vish. Elle a fait que Ça pousse tout le monde et j'ai pas été assez rapide.

    Hiloy se joignit à son humeur :

    -Ouais, j'ai vu. Elle a fait tomber Citseko.

    Neghttris secoua la tête :

    -Si elle devient aussi bourrine au moindre problème, ça risque de devenir dangereux.

    -Tu crois qu'elle se fera tuer ?

    Il eut un sourire :

    -Je crois qu'elle nous fera tuer.

    Hiloy frissonna. Je n'ai aucun mal à l'imaginer.

    -Les garçons ne sont pas avec toi ?

    Il leva les yeux :

    -Ils prennent de l'avance. Je ne suis pas vraiment très endurant.

    Il grimaça comme s'il venait d'avouer sa plus grande tare. Theaon, quelques marches plus haut, et qui, de toute évidence, écoutait leur conversation, s'étonna :

    -C'est bizarre, j'aurais pensé qu'ils seraient restés avec toi.

    Le garçon souleva un pan de sa chemise pour jeter un coup d’œil à l'endroit où il avait été frappé :

    -Pourquoi ça ?

    -Vous avez l'air très soudés, alors c'est bizarre d'imaginer qu'ils t'aient laissé derrière.

    Hiloy entraperçut un bleu énorme avant qu'il ne relâche sa chemise :

    -Et laisser mon héritier d'or en danger ? Même nous on a quelques notions de notre devoir.

    Theaon répliqua :

    -Lyert et Matior auraient pu rester.

    -Et laisser notre héritier d'or sans protection. Même nous on a quelques notions de notre devoir.

    La jeune fille perçut l'ironie dans ses paroles et se détourna.

    -Tu crois que t'as quelque chose de cassé ?

    Neghttris posa un regard interrogateur sur lae Cinquième et iel montra la blessure du doigt :

    -Tu crois que Ze t'a cassé quelque chose ?

    -Non, mais Ça tape très fort.

    Ils gardèrent le silence quelques instants avant que Neghttris n'ose dire :

    -Je peux te faire une remarque ?

    Lae Cinquième hocha la tête.

    -Tu devrais prendre l'habitude de ne pas l'appeler par son prénom. Ça n'existe plus.

    Hiloy n'avait pas besoin de demander de qui il parlait :

    -Si on ne peut pas l'appeler par son prénom, pourquoi elle en a un ?

    -Pour que Ça réalise constamment que Ça n'existe plus. Lui rappeler que Ça a eu un nom, c'est lui rappeler que Ça a eu un clan et une famille. Tu la fait souffrir en lui rappelant ce que Ça a perdu.

    Vraiment ? C'est ça la raison ? Un sifflement se fit entendre.

    -Il annonce quelque chose ?

    Neghttris sourit :

    -Non, ils prennent des nouvelles.

    L’héritier d’argent répondit avec son propre sifflement. On devrait se trouver un truc comme ça avec Falibi. Le regard d'Hiloy se posa sur le dos de Theaon. Iel avait remarqué que Falibi se montrait distante avec l'adolescente, même si iel n'aurait su dire quand cela avait commencé. En parlant du loup. Au virage suivant, iel aperçut Falibi qui les attendait sagement :

    -Et bien, vous n'êtes pas pressés.

    Une secousse les prit de court et Hiloy tomba sur les marches. Falibi dévala l’escalier jusqu'à ellui :

    -Ça va ?

    Hiloy se releva rapidement :

    -Ouais, ouais.

    Son amie s'arrêta à la hauteur de Theaon :

    -Reprenons, alors.

    Elle saisit le bras de l’héritière d’or, laissant Hiloy qui l'observait avec curiosité. Elle est pas un peu bizarre ? Neghttris lui demanda soudain :

    -Tu te souviens de quand a eu lieu la dernière secousse ? Avant celle-ci je veux dire ?

    Lae Cinquième haussa les épaules :

    -Il y a quelques minutes pourquoi ?

    Iel s'était remise en marche, mais comme le garçon ne bougeait pas, Hiloy se tourna vers lui :

    -Qu'est-ce qu'il y a ?

    -Je ne sais pas.

    Il lae rejoignit et ils rattrapèrent Bélera un peu plus haut :

    -Ah, je croyais que j'étais la dernière.

    Hiloy s'étonna :

    -Laxo est partie ?

    -Je lui ai dit de continuer.

    Encore une secousse. Cette fois, Hiloy réussit à se maintenir. Iel allait repartir, mais l'air sombre de Neghttris l'arrêta :

    -Qu'est-ce qu'il y a ?

    L'adolescent leur dit soudain :

    -Faut plus traîner. Venez !

    Il monta les marches quatre à quatre, ses camarades sur ses talons. Hiloy redoubla d'efforts pour le rattraper :

    -Qu'est-ce qu'il se passe ?

    Matior leur cria soudain par-dessus la rambarde :

    -Grouillez-vous ! Nsoah dit que ça se rapproche !

    Morte d'inquiétude, Bélera demanda :

    -Qu'est-ce qui se rapproche ?

    Neghttris prit le temps de leur répondre :

    -Les secousses, elles se rapprochent. Quoi que ce soit qui fasse s’effondrer la structure, ça accélère.

    Évidemment, c'était trop beau. Neghttris cria à l'intention de son ami :

    -On est à quelle distance du plafond ?

    -Presque !

    Ce mot suffit à motiver Hiloy qui grimpa, les yeux fixés sur les marches, concentrée sur ses pieds. Iel ne fit plus attention aux personnes autour d'ellui, tout son être été fixé sur un seul but. Il lui fallait atteindre le sommet coûte que coûte. L’adolescent.e rageait contre les secousses qui lui faisaient perdre du temps en lae déséquilibrant. Ses poumons étaient au bord de l'explosion et iel ne sentait plus ses jambes tant la douleur s'était propagée. Hiloy profitait parfois d'un de ces déséquilibres pour reprendre son souffle, avant de repartir.

    Quand des talons apparurent dans son champ de vision, iel s'arrêta net. Se retenant de pousser pour fuir un peu plus le danger. Dans le même temps, le soulagement l'écrasa et lae Cinquième se laissa tomber sur la marche où iel se tenait. Ils avaient atteint le plafond. Son sentiment de bien-être disparu au bout de quelques secondes quand iel réalisa que les autres criaient. Hiloy se releva, les jambes tremblantes. Iel était dans les dernières et, de nouveau, ne voyait rien de ce qu'il se passait devant. A sa gauche, Bélera se tordait les mains :

    -Qu'est-ce qu'il se passe ? Pourquoi on ne sort pas ?

    Juste devant elles, Qegh se retourna pour leur dire directement :

    -C'est fermé. Ils arrivent pas à ouvrir.

    Hiloy supposa que d'une manière ou d'une autre, Tahiya et Indilk étaient ceux qui se tenaient juste sous le plafond. Dans les cris, iel repéra des conseils, on demandait s'il ne voyait rien, n'y avait-il pas un bouton, un espace ? Quelque chose ne pouvait-il pas être déplacé ? Dans le tas, lae Cinquième entendit Xutik qui s'impatientait, mais iel n'y prêta pas plus attention. Une secousse venait de se faire ressentir et en se penchant par-dessus la rambarde, iel vit que l'escalier sur lequel ils se trouvaient commençait à s'écrouler. Hiloy sentit sa gorge s'assécher, son cœur battre la chamade. Iel fixait le métal qui disparaissait dans l'obscurité avec des yeux horrifiés. Son premier réflexe fut de prévenir les autres, mais iel se retint. Ils ont besoin de rester calme. Il faut qu'ils restent concentrés. Ora cria :

    -Les escaliers s'effondrent ! Grouillez-vous, merde !

    Il y eut une nouvelle poussée de cri réclamant qu'ils trouvent la solution de suite. Les voix d'Elférad et de Meb se firent soudain entendre par-dessus le brouhaha :

    -Ça suffit ! Fermez-là ! On se calme !

    Il fallut quelques secondes avant que le silence ne revienne. Hiloy observait l'énorme pilier central, autour duquel l'escalier s'enroulait, à la recherche d'un quelconque moyen pour s'y accrocher. Si les marches sous ellui s'effondraient, il lui faudrait trouver un endroit pour ne pas tomber. Son regard passa avec attention le long du pilonne jusqu'au plafond. C'est pas vrai, y a rien de rien. Puis, Hiloy aperçut quelque chose. Incertain.e, iel concentra toute son attention dessus pour s'assurer que c'est bien ce qu'iel pensait avant d'annoncer :

    -Il y a quelque chose au plafond. Là, au-dessus de nous.

    Lae Cinquième remercia mentalement les deux héritiers d'or d'avoir fait le silence car sinon, sa voix aurait probablement été perdue parmi les cris. Toutes les têtes se levèrent.

    -C'est un trou ?

    Hiloy ignorait qui avait posé la question, mais l'adolescent.e lui répondit en ellui-même que c'était bien ça. Gec-Nüj cria :

    -La manivelle ! Qui a la manivelle ?

    Indilk brandit l'outil dans sa main. Tahiya ordonna :

    -Nsoah, mets-toi sous le trou. Indilk, sur ses épaules.

    Les autres se poussèrent pour laisser les deux garçons se trouver. Elférad lança :

    -Il faut un moyen de les tenir. Ils risquent de tomber à la prochaine secousse.

    Ils firent ce qu'ils purent pour les maintenir en équilibre. Après un premier essai, infructueux, Indilk se décida à se mettre debout sur les épaules de Nsoah pour gagner en hauteur. Fais pas ça, fais pas ça. C'est toujours là que... Une secousse... L'héritier d'argent perdit légèrement l'équilibre avant que ceux qui le maintenaient ne puissent l'immobiliser. Ce fut suffisant. Indilk tomba en arrière, droit vers le vide, sans pousser un cri. Hiloy était trop loin pour agir. Iel ne put que regarder les bras se tendre désespérément vers lui. Raté la jupe, raté le pantalon, puis...

    -Je l'ai !

    C'était Vish qui avait crié, mais en se penchant par-dessus la rambarde pour tenter de voir Indilk, Hiloy vit que Citseko avait réussi à saisir le bas du pantalon tandis que l'héritière d'or agrippait sa chaussure. Le groupe sembla soudain reprendre vie se précipitant pour le faire remonter. Une fois de retour sur les marches, Indilk, nullement ému par ce qui venait de lui arriver, observa le plafond :

    -Bon, au moins, la manivelle est en place. Il n'y a plus qu'à l'actionner. Approche Nsoah.

    Hiloy était plutôt impressionné.e. Après un moment pareil, iel ne voudrait sûrement pas retenter l'expérience de sitôt. En même temps, il faut bien le faire et je doute qu'il y ait des volontaires après ça. Quand Indilk commença à faire tourner la manivelle, Tahiya s'écria :

    -Ça s'ouvre !

    L’héritier d’or accéléra le mouvement et, à chaque tour, le plafond s'ouvrait comme une immense hélice. Dès que le passage fut assez large pour passer, Tahiya se glissa dehors. Hiloy préféra ne pas regarder ce qu'il se passait derrière ellui et resta focalisé.e sur l'accès qui s'ouvrait. Les uns après les autres, ses camarades sortirent. Lae Cinquième monta les dernières marches au fur et à mesure, jetant des regards inquiets à Indilk et Nsoah. J'espère qu'ils auront le temps de sortir. Iel s'arrêta dans l'ouverture comme si sa présence pouvait l'empêcher de se refermer :

    -C'est bon, venez !

    Indilk attendit que la manivelle se bloque avant de sauter sur les marches et courir vers la sortie, Nsoah juste derrière lui. Hiloy vit le plafond se refermer doucement alors qu'iel quittait son poste. Ce n'est que là que lae Cinquième observa les alentours. Une main en visière pour protéger ses yeux du soleil, iel aperçut une immense plaine. Matior se laissa tomber sur le sol en geignant :

    -C'est pas fini ? Je croyais que c'était la fin moi.

    L'adolescent.e jeta un coup d’œil à sa tablette et sourit. Meb traduisit sa pensée :

    -Ça l'est. La fin est indiquée sur la carte. Il faut qu'on aille par là.

    Il y eut des cris de joie et de soulagement. Hiloy sursauta quand Falibi lui sauta dessus :

    -Tu es là ! J'ai cru que je t'avais perdue.

    Le groupe commençait à se mettre en mouvement. Le soleil étant déjà bien bas à l'horizon, Elférad proposa :

    -Il y a un refuge un peu plus loin. On devrait y rester la nuit.

    Des murmures lui répondirent. Après toutes ces émotions, la fatigue prenait le dessus. Hiloy avait hâte de s'effondrer sur un lit. Ou même une planche de bois, je me contenterais d'une planche de bois.

    Ils durent allumer leur lampes pour y voir avant d'enfin arriver à la cabine. Exténués, le silence avait prit ses droits sur la classe. Lae Cinquième bâillait à s'en décrocher la mâchoire. Ce fut sans prononcer un mot qu'ils entrèrent dans le refuge, sans prononcer un mot qu'ils dégagèrent le passage menant au sous-sol.

    -C'est moi ou il y a moins de lits ?

    Hiloy observa la pièce sous la lumière blafarde des néons et dut admettre qu'Ora avait raison. A la place de l'immense couloir bordé de lits superposés, ils se trouvaient dans une pièce carrée avec six lits. Laxo haussa les épaules :

    -On va devoir partager.

    -Quoi ?!

    Personne ne prêta attention à la brusque intervention de Vish. Elférad se laissait déjà tomber sur le lit le plus proche :

    -Vous faites ce que vous voulez, moi, je vais là.

    Matior eut un sourire mauvais :

    -On ne peut pas laisser notre héritier d'or ainsi, sans défense, tout seul dans ce grand lit.

    Lyert s'écria :

    -T'as raison !

    Il bondit pour atterrir lourdement sur Elférad, tout de suite suivit par Matior et Neghttris. Sous la pyramide humaine qui l'étouffait, l'héritier d'or éclata de rire. Falibi saisit le poignet d'Hiloy :

    -Viens, on prend celui-là.

    Lae Cinquième s'effondra sur le lit où Laxo et Bélera ne tardèrent pas à les rejoindre :

    -Ça vous dérange si on partage ?

    Falibi secoua la tête :

    -Si les quatre mignons réussissent à se caser dans un lit, il n'y a pas de raison que l'on n'y arrive pas.

    Hiloy vit passer Theaon et Ora qui s'installèrent sur un autre matelas. Falibi ne lui a pas proposé de venir avec nous ? Iel jeta un regard à son amie qui était en grande discussion avec Laxo. Elles conversaient à voix basse, mais Hiloy crut reconnaître le nom de Tahiya. Elles sont encore sur cette histoire de fiancé ? L’adolescent.e resta un moment à observer comment ils se partageraient les lits, prête à laisser sa place en cas de besoin. Finalement, Qegh et Vish rejoignirent Theaon et Ora. Ze semblait prête à rester debout toute la nuit. Indilk avait choisi de prendre des couvertures qui se trouvaient dans la réserve pour se faire une couchette au sol. Si bien que Xutik et Gec-Nüj, Citseko et Meb, ainsi que Tahiya et Nsoah purent dormir à deux par lit.

    Rassurée sur la situation, Hiloy s'allongea sur le bord du lit qui lui était assigné et sombra dans le sommeil. Iel se réveilla quelques heures plus tard, percluse de courbature. Se laissant glisser hors du lit, l'adolescent.e s'étira, faisant craquer ses articulations. Iel grimaça sous la lumière palote des néons en espérant que cela ne réveillerait personne. Son regard tomba sur le lit où dormait Elférad et ses amis. C'était un tel pèle-mêle de bras et de jambes, qu'iel ne put deviner qui était qui. Ils font comment pour respirer ? Lae Cinquième retint un rire et se dirigea vers la réserve, en évitant de marcher sur Indilk, pour prendre un sandwich. Une voix basse l'interpella :

    -Hiloy ?

    Cellui-ci s'empara de ce qu'iel cherchait en répondant tout bas :

    -Oui ?

    Falibi, les cheveux en pagaille, se mit maladroitement debout pour enjamber Laxo et Bélera et descendre du lit.

    -Qu'est-ce que tu fais ?

    Hiloy prit un autre sandwich et se tourna vers elle :

    -J'ai faim. Tu veux manger ?

    L’héritière d’argent se frotta les yeux en hochant la tête :

    -Ah, tiens, oui.

    Lae Cinquième enjamba de nouveau Indilk et proposa :

    -On va dehors ? Au moins, on pourra parler normalement.

    Falibi traîna les pieds jusqu'à l'escalier. Quand ils furent dans la première salle du refuge, Hiloy referma la trappe derrière son amie :

    -Ce n'est quand même pas pratique. T'imagines si quelqu'un replace le coffre ?

    Falibi se laissa tomber sur le sol :

    -C'est pour ça qu'il y a ces espèces de couloir en-dessous, je pense. Ils doivent mener à une autre sortie.

    Cette cabine-ci était plus petite que celles dans lesquelles ils avaient dormi les jours précédents. Mis à part le coffre qui dissimulait la trappe, une table et deux chaises, il n'y avait rien dans la salle en surface. Hiloy observa la jeune fille qui tentait de se recoiffer malgré le manque d'accessoire et la longueur de ses cheveux.

    -Tu ne veux pas t'asseoir sur une chaise ?

    Falibi tendit le bras et comme il lui manquait un bon mètre pour pouvoir toucher la table, elle dit d'une voix fatiguée :

    -C'est trop loin.

    Hiloy la regarda faire avec amusement :

    -Tu sais que tu as le droit de retourner te coucher. Ce n'est pas parce que je me suis levée que tu devais me suivre.

    L’héritière d’argent rassembla ses forces pour se lever :

    -Je sais. Je voulais te parler.

    Le sourire de lae Cinquième se figea :

    -De quoi ?

    Son amie atteignit enfin la table et s'affala sur la chaise :

    -De Theaon.

    Hiloy sentit son cœur accélérer. Devait-iel lui parler de ses soupçons ? Ou attendre de voir dans quelle direction allait la discussion ? Ça n'a peut-être rien à voir avec ce que m'a dit Xutik. Cette pensée s'effondra quand Falibi déclara :

    -Je ne crois pas qu'elle ait cherché à se rapprocher de toi pour te faire du mal.

    Lae Cinquième se relaxa en voyant que son amie prenait la chose plutôt bien, mais un certain nombre de question lui vinrent à l'esprit :

    -Qu'est-ce qui te fait penser qu'elle voulait se rapprocher de moi ?

    Falibi s'empara du sandwich qu'Hiloy avait laissé sur la table :

    -Xutik me l'a dit. Il est causant quand il est vexé ce garçon.

    Hiloy sentit sa gorge se nouer :

    -Il t'a dit qu'elle ferait tout pour s'élever ?

    La jeune fille en face d'ellui hocha la tête en mordant dans son sandwich.

    -Il me l'a dit aussi. Quelques jours avant le Grand Jeu.

    Inquiète que son amie soit blessée, même si elle n'en montrait rien, Hiloy ajouta :

    -Mais, peut-être qu'il s'est trompé, peut-être qu'on lui a menti.

    Falibi dit le plus sereinement du monde :

    -Non, non. Je pense que tu as pensé à la même chose que moi quand il te l'a dit. Elle sort avec moi pour se rapprocher de toi. C'est vrai.

    -Comment tu peux en être aussi sûre ?

    La question sembla l'amuser :

    -Je lui ai demandé, tiens.

    Hiloy resta un instant bouche bée :

    -Demandez quoi à qui ?

    -J'ai demandé à Theaon si elle sortait avec moi pour pouvoir te côtoyer. Dans l'escalier.

    Lae Cinquième la fixa avec admiration :

    -Et elle n'a pas cherché à se défendre ? Elle n'a pas donné d'excuse ?

    Falibi prit un air sérieux :

    -Tu m'as regardé ?

    Hiloy restait concentré :

    -Je ne vois pas...

    Son amie sourit en pointant sa tête du doigt :

    -Tu vois ce sourire, ce visage sans défaut ? Qui oserait mentir à la perfection, je te le demande ?

    L'adolescent.e se mit à rire :

    -Elle t'a quand même mentit pendant un sacré bout de temps.

    L’héritière d’argent fit un geste de la main comme pour effacer ces paroles :

    -Elle ne savait pas encore à quel point j'étais magique.

    Hiloy prit l'air de quelqu'un à qui l'on vient de révéler une évidence :

    -Oh, c'est vrai.

    Son amie prit une pause et un ton mélodramatique pour déclamer :

    -Quand trouverais-je le grand amour pour qui ma perfection ne sera pas une menace ?!

    Elle se pencha soudain en avant, saisissant les mains d'Hiloy, tout en gardant le même ton :

    -Toi seule peut comprendre ce poids, n'est ce pas ?

    Hiloy répondit sur un ton similaire :

    -Et bien... non. Toi seule est bénie de perfection, tu le sais bien.

    Falibi se rejeta dans sa chaise avec un geste théâtral :

    -Tu as raison. Je suis unique.

    Elle reprit son sérieux pour la pointer du doigt :

    -Mais tu es magique aussi. Tu le sais, ça ?

    Hiloy hocha la tête :

    -Je suis une foutue sorcière.

    -Oh, que oui et c'est pas parce que cet abruti de Troisième t'as envoyé à l'hosto une fois, que tu dois renoncer.

    Cette brusque référence à son duel lae fit éclater de rire, mais lae Cinquième reprit son sérieux assez vite :

    -Tu renonces à Theaon, alors ?

    -Exact.

    Hiloy dévisagea la jeune fille avec attention :

    -Ça ne te rend pas triste ?

    Falibi réfléchit un instant à la question :

    -Non, pas tellement. Je crois que ça fait un moment que je sens que ce n'est pas la bonne. C'était trop facile.

    -Facile ? Comment facile ?

    Son amie se mit à parler avec emphase, s'emportant au fur et à mesure :

    -Et oui. Je vois l'amour de ma vie traversant le ciel en un éclair, chevauchant un dragon aux écailles de feu, vêtue de satin et brandissant une épée de diamant !

    Elle ajouta sur le ton de la confidence :

    -Tu savais que les diamants peuvent faire très mal ?

    Hiloy lui répondit avec une légère moquerie dans la voix :

    -Je n'en doute pas un instant, mais tu sais que personne ne chevauche de dragon de nos jours.

    Falibi eut un sourire radieux :

    -Qu'importe. Je l'aimerais pareil, c'est obligé.

    -Si tu le dis.

    Lae Cinquième aurait aimé avoir sa certitude. Choisir une direction et y foncer tête baissée. Iel n'avait toujours pas avoué à ses parents qu'iel n'avait pas l'intention de se marier ou d'avoir d'enfant, même adoptés. Je suis la dernière du clan Plilaz. Dernière encore une fois. Il était étrange de savoir qu'après ellui, les Plilaz ne seraient plus les chefs du clan, qu'ils ne seraient plus les Cinquièmes. Papa va être tellement furax.

    -Tu feras comment ?

    Hiloy interrogea Falibi du regard et celle-ci compléta :

    -T'as ta mine renfrognée de quand tu penses à ton avenir. Tu ne m'as jamais dit comment tu ferais pour trouver un successeur.

    Lae Cinquième haussa les épaules :

    -Je devrais choisir une famille avec soin et leur donner la charge de gardien.

    -Tu ne pourrais pas juste désigner un gamin de votre clan ? Comme notre chef a fait. Je prendrais son nom si je lui succède. Je serais notée dans la chronologie de la famille comme sa fille, même s'il ne m'a pas élevé et mes enfants porteront son nom aussi. La famille continue.

    Pas bête ça.

    -Il faudra que j'y pense, en effet.

    Falibi rajouta en parlant bas :

    -Et concernant la fille qui est morte ? Tu as découvert quelque chose ?

    Hiloy secoua la tête :

    -Rien de probant... et je t'avoue que j'y pense moins en ce moment.

    La trappe se souleva à cet instant, laissant apparaître Ora. Elle se figea une seconde en apercevant le duo :

    -Oh, vous êtes là. Vous aussi on vous a poussé du lit ?

    Falibi pointa lae Cinquième :

    -C'est Hiloy qui m'a forcée à venir.

    Cellui-ci hocha la tête :

    -J'ai peur dans le noir.

    Ora lae dévisagea un instant pour s'assurer qu'iel plaisantait, avant de se tourner vers la fenêtre :

    -Il fait encore nuit. Je pensais qu'il ferait jour. Je croyais avoir dormi super longtemps.

    Falibi prit une expression choquée pour murmurer à Hiloy :

    -Tu m'as fait lever au milieu de la nuit ?

    Lae Cinquième répliqua par un air mystérieux :

    -Je te l'ai dit. Je suis une foutue sorcière.

    Iel se leva pour rejoindre Ora qui sortait du refuge :

    -Ne t'éloignes pas, hein.

    L’héritière d’argent se tenait juste devant la porte à observer les étoiles :

    -Non, non.

    Falibi les rejoignit :

    -Vous croyez qu'on verra des étoiles filantes ? J'ai quelques vœux qui ont besoin de se réaliser.

    Hiloy laissa échapper un petit rire. Son amie lui envoya un coup de coude :

    -Ne ris pas. C'est très sérieux.

    -Désolée.

    Soudain, Falibi demanda de but en blanc à Ora :

    -Dis, tu savais que ton héritière d'or sortait avec moi pour se rapprocher d'Hiloy ?

    L'interpellée la regarda quelques secondes avant de retourner aux étoiles :

    -Non.

    Hiloy et Falibi échangèrent un regard :

    -Elle ne t'a pas dit ce qu'elle avait l'intention de faire ?

    -On n’est pas proche et même si elle m'avait tenue au courant, en quoi c'est important maintenant ?

    Lae Cinquième observa la jeune fille. Iel n'avait jamais vraiment fait attention à l’adolescente, mais là, iel lui semblait vraiment différente de son habitude.

    -Si vous n'êtes pas proches, comment tu t'es retrouvée être son héritière d'argent ?

    Cette fois, le visage d'Ora se détendit en laissant apparaître un sourire :

    -La force des choses.

    Là, on retrouve la Ora de tous les jours. La jeune fille frappa dans ses mains :

    -Allez, je vais me chercher à manger.

    Comme Falibi allait rentrer à sa suite, Hiloy la retint :

    -Dis, tu ne trouves pas qu'elle était pas comme d'habitude ? Elle était plus...

    Hiloy chercha le mot en vain, cependant Falibi réussit à conclure avec sa propre pensée :

    -Menaçante ? Je trouve aussi, mais n'oublie pas que l'on a eu quelques moments difficiles ces derniers jours. C'est peut-être sa façon d'y faire face.

    Lae Cinquième n'était pas convaincue, mais répondit :

    -Oui, t'as peut-être raison.

    Ils retournèrent s’asseoir sur les chaises en attendant qu'Ora revienne. Celle-ci reparut en s’exclamant :

    -Je crois que j'ai écrasé Indilk.

    Encore dans l'ouverture de la trappe, elle jeta un regard mi-inquiet, mi-amusé vers le bas :

    -Je crois que je lui ai marché dessus. Il ne va pas être content.

    Falibi se redressa :

    -Comment t'as pu lui marcher dessus ? La lumière ne s'est pas allumée ?

    Ora pouffa de rire :

    -Si, mais j'ai cru que c'était un tas de drap tombé d'un des lits.

    Hiloy continua d'observer la jeune fille, mais ne trouva aucun des signes qui l'avaient inquiétés plus tôt. Laisse tomber, c'est Tefpiro qui te rend parano. Ora sortit soudain des escaliers, refermant précipitamment la trappe :

    -Je crois qu'il arrive. Vous lui dites pas que c'est moi, hein ?

    Indilk ne tarda pas à surgir du trou, visiblement d'une humeur massacrante :

    -C'est qui ?

    Falibi ne fut pas déstabilisée par le manque d'amabilité de son ton :

    -C'est qui quoi ?

    Indilk avait l'air mauvais :

    -C'est qui qui m'a marché dessus ?

    Falibi haussa les épaules. Il se tourna vers Hiloy qui secouait la tête. Avant même de jeter un œil à Ora qui s'était accroupie dans un coin de la pièce l'air de rien, il devina :

    -C'est toi, Ora.

    L'adolescente joua les innocentes :

    -Moi, pourquoi ce serait moi ?

    Il répliqua :

    -Parce qu'aux vues des papiers sur la table, ils ont fini leur sandwich et toi, tu n'as pas encore eu le temps de l'entamer.

    -Et alors ?

    L’adolescent finit de monter doucement les escaliers :

    -Je m'étais allongé au fond de la pièce. La seule raison pour laquelle on aurait pu me marcher dessus, cela aurait été pour prendre à manger.

    Ora réfléchit à une répartie, mais finit par abandonner :

    -On peut discuter d'un arrangement qui m'éviterait de me faire taper ?

    -File moi ton sandwich.

    -D'accord, mais c'est du vol.

    -Tu m'as agressé y a pas deux minutes, tu vas peut-être éviter de l'ouvrir.

    Ora ne trouva rien à redire et Indilk sortit avec son butin. Tahiya fut la suivante à sortir, quelques minutes plus tard. Dehors, la nuit commençait à s'éclaircir. En la voyant apparaître, Falibi demanda à Hiloy dans un murmure :

    -Tu crois que son annonce a marché ?

    Hiloy s'était à moitié rendormie et mit quelques secondes à comprendre de quoi son amie parlait. Iel jeta un bref regard à Tahiya qui sortait :

    -J'en sais rien. Qu'est-ce que vous avez tous avec cette histoire, en ce moment ?

    Falibi prit la mine d'un enfant que l'on aurait réprimandé :

    -C'est Laxo qui me l'a remise en tête. C'est pas ma faute.

    Hiloy croisa les bras sur la table pour y poser sa tête et se rendormir quelques secondes. Iel ne voulait pas retourner en bas, de peur de réveiller d'autres personnes. Seulement, Falibi insista :

    -Alors ? Tu crois que ça a marché ?

    Lae Cinquième marmonna :

    -Je sais pas.

    -Je devrais essayer aussi.

    -Mmmh.

    Falibi se leva :

    -Je vais aller lui demander.

    Hiloy releva légèrement la tête pour la voir sortir, avant de se reposer à nouveau. C'est Bélera qui lae secoua doucement pour lae réveiller :

    -Hiloy, on va y aller.

    Lae Cinquième se redressa en s'étirant, étonné.e de voir que le jour était levé :

    -Tout le monde est debout ?

    Bélera acquiesça et Hiloy se leva pour aller chercher son sac. Ce jour-là, ils progressèrent sans difficulté, puis un mur gigantesque apparut à l'horizon. Avec un ton mêlant crainte et espoir, Qegh demanda :

    -C'est la sortie, non ?

    J'espère bien. Ils accélérèrent voyant se dessiner au fur et à mesure de leur avancée une porte immense. Hiloy résista à l'envie de courir. C'est trop facile. Iel resta attentive Les voyant à deux doigts de la course, Elférad leur lança :

    -Faites gaffe, on peut encore se prendre un truc sur la gueule.

    Mais ils approchaient encore et encore sans que rien ne se passe. La méfiance finit par les faire ralentir, se tournant pour observer les alentours avec attention. Quand ils arrivèrent juste devant la porte, ils s'arrêtèrent en ligne. Au bout d'un assez long moment de silence, Neghttris demanda :

    -Qui veut se lancer ?

    Laxo rejeta :

    -C'est bon, j'ai déjà était première.

    Xutik ajouta :

    -Moi aussi, j'ai eu ma part.

    Bon, on va pas rester là trois heures. Hiloy s'avançait quand iel vit Vish pousser Ze et qu'iel entendit Meb envoyer Citseko. Ils furent donc trois à approcher de la porte.

    -Hiloy, Hiloy !

    Iel se retourna pour savoir pourquoi ils l'appelaient tous ainsi et les vit faire des signes pour qu'iel revienne. Lae Cinquième prit un air d’incompréhension :

    -Quoi ?

    Citseko lui glissa à l'oreille :

    -Ce n'est pas prudent. Tu seras plus en sécurité là-bas. Ze et moi, on va voir s'il y a un problème.

    Hiloy fronça les sourcils, reposant son regard sur la ligne de ses camarades qui attendaient. Falibi s'avança à grands pas, en pointant son blason du doigt. La jeune fille baissa les yeux sur la fourmi aux ailes de diamant. Oh, c'est encore ça. Lae Cinquième tourna les talons pour observer la porte. Il y a peut-être un code ou...

    -Attends moi !

    Falibi vint s'agripper à son bras :

    -Qu'est-ce qu'il faut faire ?

    Citseko vint près d'elle :

    -Peut-être qu'il y a un truc, comme la manivelle qu'on avait trouvé.

    Xutik leur cria :

    -Essayez de pousser.

    Hiloy grimaça en se tordant le cou pour essayer de voir le haut de la porte. Je ne crois pas. Ze posa tout de même la main sur le métal. Hiloy lui dit doucement :

    -Je ne pense pas que l'on puisse la pousser.

    Lorsque l'esclave retira sa main, une empreinte bleu resta sur la porte quelques secondes avant de disparaître. Falibi et Hiloy échangèrent un regard :

    -On dirait...

    -Ça ressemble au truc avec la sphère.

    Hiloy comprit bien à quoi elle faisait référence :

    -Il faut qu'ils viennent alors, vous ne croyez pas ?

    Citseko et Falibi acquiescèrent. Lae Cinquième se tourna vers les autres qui avaient déjà commencé à les rejoindre. De toute évidence, ils ne tenaient pas à ce qu'on dise qu'ils se tenaient en retrait, pendant que Hiloy se faisait attaquer.

    -C'est comme pour ouvrir la sphère. Il y a le truc des empreintes.

    Avant que Tahiya ne puisse l'arrêter, Nsoah posa la main sur la porte et la retira. Quand tous purent constater ces dires, Matior demanda :

    -On pose la main tous ensemble alors ?

    Neghttris haussa les épaules :

    -On a qu'à essayer.

    Elférad éleva la voix :

    -OK. Tout le monde est prêt ? A trois.

    Ils durent se serrer pour que tous puissent toucher la porte. Ils attendirent quelques secondes avant qu'une vibration ne se propage dans le métal. Qegh demanda à mi-voix :

    -C'est normal, ça ?

    Lyert lui répliqua :

    -Comment veux-tu qu'on le sache ?

    Il y eut un déclic, puis un grincement tonitruant et la porte commença à s'ouvrir vers l'extérieur. Indilk s'écarta en disant :

    -Vous devriez reculer. On ne sait pas ce qu'ils ont foutu derrière.

    Ils obéirent, attendant l'écartement des portes avec une certaine appréhension. De l'autre côté, des cabanes étaient installées, des hommes et des femmes vêtus de blanc semblaient les attendre. Hiloy se pencha vers Falibi :

    -C'est quoi ça ?

    L’héritière d’argent était radieuse :

    -La fin.

    Le groupe s'élança sans plus de méfiance vers l'autre côté. Hiloy comprit que les adultes présents étaient des médecins, des cuisiniers et des surveillants mit à la disposition de la classe. Seulement, lae Cinquième s'étonna de voir qu'une fois la porte refermée derrière eux, il n'y avait pas d'autres sorties. Ils se trouvaient dans un vaste espace circulaire délimité par le même mur gigantesque que celui qu'ils avaient vu plus tôt. Iel finit par découvrir une autre porte, à taille humaine celle-ci, mais ne réussit pas à l'ouvrir. En même temps, personne n'a l'air pressé de partir. De fait, ses compagnons exploraient les cabanes ou se dirigeaient vers le buffet installé à leur intention. Hiloy repéra Falibi et courut vers elle :

    -On ne sort pas ? Je croyais que c'était fini ?

    Son amie hocha la tête en se dirigeant vers les plats :

    -C'est fini. Mais les autres classes ne sont toujours pas sorties. On ne peut pas partir tant que les autres sont encore à l'intérieur.

    Hiloy soupira. Je veux retrouver ma chambre.

    -Ne fais pas cette tête.

    Iel sourit à l'héritière d'argent :

    -Oui, au moins, on ne peut pas se faire attaquer... on ne peut pas se faire attaquer, hein ?

    Son amie confirma en lui tendant une assiette :

    -Non seulement on ne se fera plus attaquer, mais en plus, fini les sandwichs !

    -Whouhou !

    Hiloy accueillit, avec un bonheur nouveau, l'assiette fumante et ils allèrent s’asseoir dans l'herbe un peu plus loin.

    -Comment on saura si les autres ont fini ?

    -Il y aura des annonces par haut-parleur.

    Lae Cinquième posa les yeux sur la tablette qui s'était éteinte sitôt qu'ils avaient passé la porte :

    -Mais, on ne sait pas combien de temps on doit attendre ?

    Falibi s'empressa de répondre :

    -Pas exactement. Eux, ils ont reçu un message les informant qu'une classe était sortie. A partir de là, un décompte se met en marche sur leur tablette. Ça dépend des jeux, mais ils ont quelques heures ou quelques jours maintenant pour arriver à destination.

    -Sinon quoi ?

    Son amie pointa sa fourchette vers les adultes qui les entouraient :

    -Ils vont les chercher. Si ça arrive, les héritiers ne récupèrent aucun point privilège.

    C'est vrai qu'il y avait ça aussi. Par réflexe, iel baissa les yeux vers le petit écran noir, avant de ce souvenir qu'il n'affichait plus rien. C'est pas vrai. Iel la retira de son bras pour ne plus être tenté de regarder :

    -Quand est-ce que l'on va savoir pour nos points ?

    -Quand tout le monde sera arrivé.

    Hiloy laissa errer son regard alentour :

    -Tu crois qu'ils vont compter ça comment ? On a passé la porte ensemble.

    Falibi planta sa fourchette dans un morceau de viande juteux :

    -Je crois qu'on va tous avoir les mêmes points, vu que tout était fait pour que l'on arrive tous en même temps.

    C'est vrai. Ce Grand Jeu n'était pas basé sur la compétition. Falibi avala sa bouchée avant d'ajouter :

    -La seule question que je me pose, moi, c'est quand est-ce qu'on pourra enlever ça.

    Elle leva son poignet pour mettre son bracelet en évidence. Hiloy regarda le sien. J'avais oublié qu'il était là, lui :

    -On ne peut pas l'enlever nous-même ?

    Son amie fronça le nez :

    -Je ne préfère pas essayer.

    Ils finirent de manger avant de se diriger vers les cabanes. L'une d'elle contenait des douches, une autre des toilettes, une autre des lits et encore une autre des tables et des chaises pour manger à l'abri de la pluie. On leur prêta des pantalons et des chemises, tous bleus et quand chacun fut passé à la douche et ressorti, ils étaient tous vêtus ainsi.

    Hiloy accrocha son blason à cette nouvelle chemise, tandis qu'un homme emportait son uniforme pour le laver. Iel s'aperçut alors,que Falibi était retournée s’asseoir face à la porte :

    -Qu'est-ce que tu fais ?

    L'adolescente eut un pâle sourire :

    -Je commence à m'inquiéter.

    Hiloy s'accroupit près d'elle :

    -Pourquoi ?

    -Eh bien, je sais qu'ils nous a fallu un bon moment pour arriver jusqu'ici et tout ça, mais ça fait quelques heures que l'on est là maintenant. Tu ne crois pas que d'autres auraient déjà dû arriver ?

    Lae Cinquième haussa les épaules :

    -Je ne peux pas vraiment t'aider sur ce genre de question. Je ne savais même pas en quoi consistait exactement un Grand Jeu avant que tu m'expliques, alors.

    Falibi ne parut pas l'entendre. Pourquoi elle angoisse comme ça. Même si les gardes doivent finir par les chercher, ce n'est pas si grave. Sentant que quelque chose lui échappait, iel parla doucement :

    -Falibi ? Tu t’inquiètes pour Rafirin ? Je suis sûr qu'il arrivera à temps. Au pire, je pourrais lui donner des points. On a le droit, non ? Avec l'avance de départ qu'on me donne, je pourrais lui en passer.

    Son amie passa les bras autour de son cou :

    -Tu es toute gentille et c'est pour ça qu'on t'aime.

    Même dans sa plaisanterie, le ton était différent.

    -Qu'est-ce qui ne va pas, si c'est pas ça ?

    Falibi reprit son sérieux en tournant son regard vers la porte :

    -Parce que s'ils n'arrivent pas à temps, cela peut signifier qu'ils n'ont pas réussi à avancer. S'ils n'ont pas réussi à avancer, vu la mise en place du Grand Jeu, cela peut signifier qu'ils ont perdu quelqu'un.

    La réalité rattrapa soudain Hiloy. Malgré des moments terrifiants, ils s'en étaient très bien sortis. On aurait pu mourir à de nombreuses reprises. Iel revit Indilk chuter dans le vide. L'inquiétude de Falibi finit par lui être transmise et iel s'installa près de son amie pour attendre. Laxo les rejoignit quelques instants plus tard :

    -Vous aussi vous avez entendu ?

    Le duo lui jeta un regard interrogateur.

    -Non ? Bélera a demandé aux surveillants combien de temps les autres avaient pour arriver et ils lui ont dit que l'intervention aurait lieu dans la nuit.

    Falibi en conclut :

    -Donc, ils ont jusqu'à ce soir.

    Laxo acquiesça et s'assit :

    -Oui. Ils ne doivent plus être loin...

    Le son d'une corne se fit entendre, les rendant tous attentifs. Dans les hauts-parleurs, une voix annonça :

    -Classe Tigre en approche.

    Hiloy fixa la porte :

    -C'est Rafirin, ça, non ?

    Falibi lui agrippa le bras en silence.

    -Quand est-ce qu...

    Son ami.e leva sèchement un doigt pour qu'elle se taise. Le haut-parleur reprenait :

    -Intacte.

    Falibi relâcha un souffle retenu depuis un peu trop longtemps. En sentant sa prise se relâcher sur son bras, Hiloy tenta :

    -Intacte, pas de morts, hein ?

    La jeune fille se leva d'un bond en criant, laissant exploser sa joie. Hiloy et Laxo éclatèrent de rire en la voyant faire. A cet instant, la porte commença à s'ouvrir. Falibi courut à la rencontre des nouveaux venus, imitée par Hiloy. Ils observèrent chaque visage qui entra à la recherche de leur ami. Hiloy saisit soudain le bras de Falibi:

    -Là ! Là ! Juste là !

    Rafirin se tenait sagement sur le côté de la porte, laissant ses camarades entrer. Falibi lança à plein poumon :

    -Rafirin !

    L'adolescent se redressa à la recherche de la jeune fille dont il avait reconnu la voix. Il lui fit un geste du bras, souriant :

    -Et Hiloy ?

    Cellui-ci ricana en disant :

    -Je sais que comparé à toi je suis petite, mais quand même.

    Falibi se mit à rire :

    -Iel est juste là.

    Rafirin finit par se glisser dans l'ouverture et se retrouva étouffé dans l'étreinte de Falibi. Hiloy lui avoua :

    -On commençait à s'inquiéter.

    Rafirin lui sourit :

    -Pour moi ? Alors que tu étais seule avec Falibi ? J'espère qu'elle ne t'a pas apporté trop de problèmes.

    Hiloy secoua la tête :

    -Ça va. Je la maîtrise.

    Falibi s'écarta du garçon, remit une de ses mèches couleur prune derrière son oreille avec la plus grande dignité :

    -Je ne vous aime plus.

    Elle leur tourna le dos pour s'éloigner, mais Rafirin lui courut après et la rattrapa sans difficulté. Hiloy s'arrêta près de Laxo qui était restée assise :

    -Tu attends Mechem ?

    La jeune fille fut surprise de la question :

    -Les secondes années arrivent dans une autre zone.

    -Ah bon.

    Iel s'assit :

    -Tu attends quelqu'un d'autre, alors ?

    Laxo haussa les épaules :

    -Pas spécialement. J'essaie de faire du repérage de classes. C'est toujours intéressant de réussir à situer quelqu'un quand tu le croises. Si tu sais dans quelle classe il est, tu peux voir qui sont ses potentiels alliés.

    Hiloy était impressionné.e. Iel n'arrivait pas à retenir un nom ou un visage à l'extérieur de sa propre classe. La seule raison pour laquelle j'ai retenu que Mechem était son fiancé, c'est parce que Falibi n'a pas arrêté de m'en parler après qu'on l'ai vu.

    -Classe Lion en approche.

    Hiloy se retourna en entendant des pas s'approcher. Meb arriva à leur hauteur :

    -C'est bien Lion qu'il a dit.

    Ils confirmèrent.

    -Citseko, viens-là. Ils vont annoncer les morts.

    L'héritier d'argent qui se tenait à quelques pas derrière lui, le rejoignit, s'inclinant devant Hiloy et Laxo. Il doit le faire chaque fois qu'il me voit ou bien ? En réponse, iel lui sourit avec un léger signe de la main.

    -Intacte.

    Meb sourit :

    -Parfait. Viens, on va chercher Dsouphan.

    -Hiloy ! Je t'avais perdu !

    Falibi revint s’asseoir près d'ellui.

    -Rafirin est allé manger ?

    Elle hocha la tête :

    -Il nous rejoint après.

    Ils regardèrent la porte s'ouvrir et les élèves qui entraient. Bélera s'approcha, tendant une tasse à Laxo :

    -Je t'ai ramené un jus d'orange.

    Le visage de l'héritière d'or s'illumina :

    -Oh, où t'as trouvé ça ?

    Bélera pointa le buffet :

    -Ils viennent de le sortir.

    Hiloy se tourna brusquement vers la table :

    -Y a du jus de fruit ?

    Bélera acquiesça en souriant :

    -Oui, tu veux que j’aille t'en chercher ?

    -Non, c'est bon. J'y vais. Falibi, je t'abandonne. Adieu.

    La jeune fille se mit à geindre en tendant le bras vers son ami.e :

    -Non, pourquoi ?

    En riant, Hiloy lui demanda :

    -Tu veux quelque chose ?

    Allongée par terre, gardant une pose de désespoir, elle répondit :

    -Un jus d'orange, ça me va aussi.

    Hiloy courut jusqu'au buffet, de crainte qu'il n'y ait plus rien. A cet instant, le haut-parleur annonça :

    -Classe Lynx en approche.

    Ça s'accélère. Cool. Iel ramena les deux gobelets :

    -Meb et Citseko sont encore devant la porte ?

    Falibi s'empara de son verre :

    -Oui, je crois qu'ils ont d'autres amis dans la classe qui...

    -Dix-neuf.

    Hiloy vit son amie se figer, Laxo et Bélera retinrent leur souffle. Dix-neuf ? Comme dix-neuf...

    -Quand il dit dix-neuf, ça veut dire...

    Falibi lâcha :

    -Un mort.

    Hiloy ne bougea plus, les yeux sur la porte. Meb, Citseko et un autre garçon qu'ils venaient de retrouver avaient aussitôt arrêté de parler. Le haut-parleur ajouta :

    -Romal Trinh. Décédé.

    Hiloy attendit de voir si quelqu'un réagissait, mais personne ne bougea. La porte s'ouvrit pourtant.

    -Je ne comprend pas. Comment ils peuvent l'ouvrir s'ils ne sont pas tous là ?

    Laxo lui répondit :

    -C'est pas eux. C'est les surveillants.

    La classe qui passa l’entrée apporta une atmosphère toute différente. Ils s'observaient les uns les autres avec une méfiance évidente. Qu'est-ce qu'il leur est arrivé ? Une fois entré, ils s'écartèrent, mis à part quelques petits groupes et duos. Hiloy vit Meb approcher un des garçons.

    -Ce ne devait pas être un accident.

    Hiloy détacha enfin son regard de la porte pour se tourner vers Rafirin qui venait de les rejoindre :

    -Comment ça ?

    L'adolescent désigna la classe éclatée en différents groupes :

    -Si ça avait été un accident, ils n'agiraient pas comme ça. Ils se méfient parce qu'ils pensent qu'il y a un assassin parmi eux.

    Falibi rejeta la tête en arrière pour voir ses deux amis, debout, derrière elle :

    -Pas forcément. Ils ont peut-être honte de ne pas avoir pu le sauver.

    Je pense qu'on ne le saura jamais. Iel fut néanmoins contente de voir que Meb avait retrouvé son ami.

    -Il reste trois classes encore.

    Hiloy se tourna de l'autre côté pour apercevoir Neghttris. Matior, Lyert et Elférad étaient également présents. Iel ne se souvenait pas d'avoir déjà vu l'héritier d'or aussi pâle. C'est vrai que Gzadien n'est toujours pas là. Il est dans quelle classe ? Personne ne bougea quand la porte se referma, comme s'ils s'attendaient à ce qu'elle se ré-ouvre aussitôt. Matior finit par soupirer baissant les yeux sur les verres qu’ils avaient en main :

    -Vous avez eu ça où ?

    Hiloy pointa le buffet comme Bélera l'avait fait plutôt :

    -C'est au bout de la table. Je sais pas s'il en reste encore.

    -Qui en veut ? Neghttris ? Lyert ? Elférad ?

    Les deux premiers acceptèrent, mais Elférad resta silencieux.

    -Elférad, tu veux un jus de fruit ?

    Il lui toucha doucement le bras et son ami répondit du bout des lèvres :

    -Non, merci.

    Neghttris dit à Matior avant qu'il ne s'éloigne :

    -Apporte-lui un verre quand même.

    Lyert détacha son regard de la porte avec difficulté :

    -Je vais t'aider.

    Hiloy observa Elférad, tendu, les bras croisés, les mâchoires crispées, iel avait l'impression qu'il tomberait en morceaux au moindre coup :

    -Tu veux t'asseoir ?

    Iel montra une place juste derrière ellui, mais l’héritier d’or ne baissa même pas les yeux. Neghttris lui répondit :

    -Ne le prends pas mal, il est complètement déconnecté, là.

    Laxo demanda :

    -Gzadien est dans quelle classe ?

    -Guépard, mais on a deux amis dans l'autre classe.

    Ce fut à cet instant que Nsoah apparut :

    -S'ils mettent si longtemps à revenir, ça veut dire qu'ils sont bloqués, donc qu'il y a des morts. C'est pas bien, ça.

    Hiloy entendit Elférad inspirer profondément et se leva pour faire face à Nsoah :

    -Pourquoi tu es seul ? Tu as perdu Tahiya ?

    Le garçon fixa ses pieds :

    -Ma cousine prend à manger. Elle a dit « attend ».

    Hiloy sourit :

    -Pourquoi tu l'attends si loin ? Elle risque de s'inquiéter si elle ne te voit pas près du buffet.

    Le garçon secoua la tête :

    -Non, elle sait que je suis malin. Je voulais être avec vous.

    Neghttris s'approcha également pour lui faire remarquer gentiment :

    -Tu sais qu'il y a certaines choses qu'il vaut mieux ne pas dire, n'est-ce pas Nsoah ? Ça peut faire de la peine aux autres.

    L'adolescent ne comprit pas à quoi il faisait référence, mais dans le doute, il préféra ne plus ouvrir la bouche. Falibi murmura à l'intention de Neghttris :

    -Je croyais qu'il était complètement déconnecté.

    -Il n'est pas sourd pour autant. Il filtre les infos.

    Elférad finit par dire :

    -Tu me fais passer pour quoi, franchement ?

    Son ami répliqua avec un pauvre sourire :

    -Un robot.

    L'héritier d'or n'eut pas la force de sourire. Qegh arriva soudain en courant :

    -Les gars ! Ça y est, ils vont entrer !

    Hiloy resta bouche-bée :

    -Ça veut dire...

    Neghttris la coupa :

    -Pas forcément quelque chose de dramatique.

    Lyert et Matior revenaient à toutes jambes :

    -Vous avez entendu ? Ils vont les chercher.

    De fait, Hiloy entendit le son d'hélicoptère et ne tarda pas à en voir passer une dizaine au-dessus de sa tête. Iel se tourna vers Falibi :

    -Comment on saura pour les... morts ?

    Iel avait jeté un regard rapide à Elférad et avait baissé la voix pour finir sa phrase. La jeune fille répondit :

    -Ils transmettront quand ils les trouveront.

    Ils attendirent donc, plusieurs minutes, puis une heure. Hiloy sentait son estomac se tordre de nervosité pour Elférad et ses amis. Et puis, iel aimait bien Gzadien. Leur partie de cache-cache fusait dans sa tête. Les moments partagés avec lui. Iel sentait déjà les larmes lui monter aux yeux. Arrête, il n'est pas mort. Ils n'ont encore rien dit. C’est idiot de pleurer maintenant. En particulier parce que les quatre garçons ne pleuraient pas. Elférad semblait s'être changé en statue de sel. Matior s'était accroupi, les bras entourant son ventre comme s'il était douloureux. Lyert se rongeait les ongles et Neghttris fermait et ouvrait ses poings de manière compulsive.

    Finalement, alors que le soleil baissait à l'horizon, ils entendirent le bourdonnement du haut-parleur et retinrent leur souffle. La voix annonça :

    -Classe Margay. Intacte. Classe Guépard. Dix-huit.

    Les regards se tournèrent vers les quatre garçons, alors qu'Elférad refusait de quitter la porte des yeux.

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